Areopage 42 ( May - 2024 )

Editorial

Par Abbé. Védaste KAYISABE

Saint Thomas d’Aquin et le bonheur

Le bonheur, selon notre connaissance générale, est un état ultime auquel aspire tout homme. C’est une condition plus ou moins stable de satisfaction totale qui occupe une place importante surtout dans l’Antiquité classique. Les attentes et les expériences du bonheur dépendent souvent de la diversité individuelle et socioculturelle. Le terme est assimilé à deux autres : la béatitude et la félicité. Chez les Epicuriens, la félicité était perçue comme l’usage rationnel et contrôlé du plaisir tandis que, chez Socrate, elle s’accompagne de l’exercice rationnel rigoureux et de la contemplation des formes idéales. Les stoïciens considéraient que la félicité du sage se trouve dans la maîtrise des passions et dans la prise de conscience de la parfaite rationalité. Selon eux, seul l’homme vertueux est heureux. Le plus grand bien, disait l’idéaliste Emmanuel Kant, est l’union de la vertu et du bonheur. Il soutenait que le bonheur est parmi les modes indicateurs de la finitude humaine, car, dans l’ordre temporaire, il est impossible d’en atteindre la totalité.

La philosophie moderne qui comporte plusieurs répercussions sur les vagues de l’époque contemporaine semble éviter de faire une analyse du bonheur. Elle en parle à travers des raccourcies et le dépeint par l’absurde en insistant sur le malheur de l’homme, ses frustrations, son aliénation et son incommunicabilité. En gros, la félicité est traitée comme étant le résultat des compliments des succès extérieurs au sujet. La notion de béatitude vient à point nommé comme pour indiquer un niveau supérieur du bonheur, teinté de religiosité. Elle est l’ultime perfection de la personne. Le bien final de l’homme se trouve dans l’attachement à Dieu.

L’originalité de saint Thomas d’Aquin est qu’il place le sommet du bonheur dans la vision béatifique qui nécessite l’aide de la grâce de Dieu. En effet, notre élévation à la vie surnaturelle grâce à l’action rédemptrice du Christ change complètement la conception et le sens de notre vie. St Thomas d’Aquin était convaincu que la destinée de l’homme se réalise dans l’union d’amour avec Dieu, et ceci dans une autre vie. Le vrai bonheur consiste donc dans une certaine trajectoire qui s’achève en dehors du temps, dans une contemplation de la Vérité. L’homme ne peut être parfaitement heureux tant qu’il lui reste quelque chose à désirer et à chercher.

Nous sommes toujours dans les célébrations du triple Jubilé de Saint Thomas d’Aquin. Dans ce numéro de l’Aréopage, vous aurez encore l’occasion d’approfondir l’analyse de sa pensée, notamment sa philosophie sociopolitique, son éthique et son anthropologie. Les articles feront une plongée dans les problématiques postmodernes pour tenter des réponses dans la vision thomiste. A l’heure où s’installe lentement mais surement la confusion à plusieurs niveaux, vous trouverez, en lisant, quelques orientations de la conscience morale droite et de l’intelligence pratique. Bonne lecture

La quête du bonheur dans les limites de la condition humaine

La pertinence d’une thérapie thomiste des questions sociétales du postmodernisme

Par Abbé Athanase KOMERUSENGE

Introduction

Sur l’estrade du grand amphithéâtre de la Sorbonne, devant un auguste assemblé, en date du 25/04/2024, Emmanuel Macron déclara : « Mon message d’aujourd’hui est simple. Paul VALERY disait, au sortir de la Première Guerre mondiale, que nous savions désormais que nos civilisations étaient mortelles. Nous devons être lucides sur le fait que notre Europe, aujourd’hui, est mortelle. Elle peut mourir. Elle peut mourir, et cela dépend uniquement de nos choix. Mais ces choix sont à faire maintenant. »

Que l’Europe soit mortelle et que cela dépendent de « nos choix », cela surprend peu, car en fait, depuis les siècles les plus reculés, les civilisations sont mortelles. Cependant, sur les pas des penseurs de la Renaissance et de façon beaucoup plus ample sur la voie des ténors de la Révolution française, il pose la bonne question mais il propose toute une série des réponses, qui ne rassurent pas. En tout cas, sur une liste très longue et très diversifiée de ses thérapies; tout part de l’homme et fini par l’homme. Par l’énoncée « nos choix », il souligne le fait que les choix des acteurs politiques qui s’érigent en législateurs absolus ne procure pas le bonheur.

Que l’Europe soit « prête à mourir », cela est un constat désagréable. Et pourtant ce qui nous paraît beaucoup plus ahurissant, c’est qu’elle ne peut pas mourir seule. Un simple regard panoramique sur les quatre coins du monde confirme qu’aucune contrée, dans aucun domaine n’est épargnée. Pour reprendre les propos du feu Cyprien Rugamba, « Isi irarwaye-le monde est malade ». Bref, au delà, de cette Europe géographique, nous nous faisons l’idée de cette civilisation qui s’est construite sur un refus formel, pourtant forcé, de toute sorte de transcendance et par conséquent incapable de se transcender. Les tentacules de cette civilisation pataugent partout et défont des frontières, tant géographiques qu’identitaires.

Mais alors, au moment où l’univers, dans toutes ses dimensions, ne cesse de surprendre par les découvertes prodigieuses au profit et/ou au détriment de l’humanité, les acteurs politiques et les domaines connexes, ont-ils vraiment raison de s’établir en législateurs absolus du monde ? Quelle serait la disposition réaliste et sincère à prendre ? Autrement dit, quelle serait la thérapie efficace pour ce monde malade ? Au cours de notre réflexion, nous allons en un premier temps, revoir l’historique de la problématique du bonheur de l’homme. En un second temps, nous allons revisiter quelques thèmes de la pensée de Saint Thomas. En dernier lieu, nous examinerons en quoi la pensée politique de Saint Thomas, peut constituer une thérapie aux questions sociétales du postmodernisme.

1. L’historique de la problématique du bonheur

1.1. La quête du bonheur, fondement de la politique

A proprement parler, l’homme est un être qui, dès la prise de conscience de soi, se découvre limité dans le temps et dans l’espace. Il se retrouve confronté à tout un ensemble des limites a priori qui esquissent sa situation fondamentale dans l'univers : l'être dans le monde ; le travail ; l'être au milieu des autres et la mort. Telle est, d’après Jean-Paul Sartre, la condition humaine. Conscient des contraintes imposées par la condition humaine, l’homme se retrouve obligé de lutter pour sa suffisance.

Or, d’une part, « le fait de ‘‘se suffire à soi-même’’, (…) c’est ce qui, pris à part de tout le reste, rend la vie désirable et n’ayant besoin de rien d’autre ». D’autre part, « le bonheur est aussi la chose la plus désirable de toutes en ne figurant pas cependant au nombre des biens (…) On voit donc que le bonheur est quelque chose de parfait et qui se suffit à soi-même, il est la fin de nos actions ». Que le bonheur soit le bien le plus parfait et la fin de toutes les actions de l’homme en vue de se suffire à soi-même, on en doute pas ; mais comment peut-il y parvenir ?

En définissant l’homme comme un animal politique, Aristote fait une énoncée d’intensité considérable. Le vivre le l’homme est toujours le vivre-avec (kubaho ni ukubana). Cela signifie que, étant donné ses limites, l’homme ne peut pas se suffire à lui-même. Pour mieux vivre, il a besoin d’un secours de l’autre qui, de sa part, a aussi ses propres limites différentes des siennes. Dans le vivre ensemble, chacun bénéficie de la force de l’autre en vue du bonheur de tous. Quoi qu’il en soit, « “Celui qui ne peut pas vivre en société, ou qui n’a besoin de rien parce qu’il se suffit à lui-même, ne fait point partie de l’État; c’est une brute ou un dieu” ».

Cependant, si dans le « vivre ensemble » chacun met sa force à la disposition des autres en vue du bien de tous, il n’en demeure pas que chacun apporte ses limites aussi au détriment du bonheur de tous. Lors que l’ensemble des limites remporte sur l’ensemble des forces, le bonheur devient quasiment impossible. Pour pallier à ce problème, il faut nécessairement une organisation, des structures, des lois, des normes et des procédures garantissant la mise en marche et la mobilisation de toutes les forces, en vue du bonheur de tous dans une communauté humaine ; c’est ce que signifie la politique dans son sens le plus original.

Autrement dit, si le « vivre ensemble » est un choix préalable, il n’est pas le but ; la fin dernière de la communauté humaine est la constitution d’une cité, en termes modernes, d’un État. Seul l’État est capable d’instaurer une contrainte qui a pour but la justice ; avec la cité en effet, la violence fait place à l’État de droit. Étant donné que le droit est la règle de la communauté politique, la justice est une valeur politique. A la base de toute politique, au sens propre du terme, se trouve la quête du bonheur.

1.2. La préséance de la vertu dans la politique en vue du bonheur

La quête du bonheur pousse les hommes à constituer une communauté politique, c’est-à-dire, une communauté dotée de structures, d’ordre, de lois, des normes et des procédures en vue du bonheur de ses membres. Comme nous venons de l‘évoquer, la loi fait appel au droit. Le droit, à son tour, fait appel aux vertus, c’est-à-dire ces dispositions intérieures qui permettent aux individus à vivre selon le droit et sans lesquelles les individus seront en conflit avec la loi et par conséquent entre eux ; ce qui fait obstacle au bonheur. Autrement dit, toute politique, meilleure qu’elle puisse paraître, ne pourrait, en aucun cas, procurer le bonheur aux membres de la communauté, si elle ne se base pas sur les vertus.

Il en découle donc que le droit, cet ordre établi par la communauté politique entre ses membres, est un ingrédient de croissance en vertus morales. Le droit permet à l'individu d'atteindre sa perfection, raison pour laquelle, selon Aristote l’éthique est subordonnée à la science politique et la recherche de la vie heureuse est presque impossible si on ne vit pas dans une cité gouvernée par des lois justes. Autrement dit, toute association politique repose sur des bases éthiques , car « sans la vertu, l’homme est l’être le plus pervers et le plus féroce, le plus bassement porté vers les plaisirs de l’amour et du ventre».

Vivre dans une cité régie par des bonnes lois, c’est le meilleur moyen d’acquérir les dispositions nécessaires à la vie morale, car « l’éducation publique s’exerce évidemment au moyen des lois et seulement de bonnes lois produisent une bonne éducation ». Vue l’importance de la vertu dans une communauté politique, la croissance des membres d’une communauté politique ne doit pas dépendre seulement du droit. De toutes les façons, l’intelligence et la volonté doivent être conjointement prédisposées à militer pour le bonheur. Les membres de la communauté doivent être éduqués à la pratique des vertus, tant intellectuelles que morales.

En fait, vue l’adversité liée à la condition humaine décrite plus haut, toute communauté humaine qui se défait des vertus ne peut point procurer le bonheur à ses membres. Le bonheur résulte d’une vie conforme à la vertu. La vertu doit être pratiquée de manière continuelle, et non pas épisodique. Au fond, l’homme doit développer l’habitude de bien agir, développer le potentiel moral qu’il détient en puissance.

1.3. Les insuffisances du contrat social

Par les paragraphes précédents, la politique, le droit et la vertu constituent un triolet qui implique le bonheur. Il s’agit d’une construction cohérente qui date du quatrième siècle avant Jésus-Christ, à l’époque de la philosophie classique grecque dominée principalement par Socrate, Platon et Aristote. Bien qu’il s’agisse d’un système qui nous paraisse logique, nous nous permettons de le soumettre à l’examen, pour savoir si réellement depuis son origine il aurait pu procurer le bonheur tant désiré par les hommes.

Si la quête du bonheur est un préalable permanent pour tous les hommes, la pratique de la vertu ne l’a pas été toujours, raison pour laquelle, les empires, mêmes les plus forts que l’humanité ait connus, fût-il grec qui a hérité des grands philosophes classiques, à savoir Socrate, Platon et Aristote, ne sont jamais parvenus à procurer le bonheur aux communautés humaines qui les constituaient. Si au départ de chaque empire tout semble fonctionner correctement, à l’apogée tout change. Le cas qui est le plus récurent c’est la justice distributive qui bascule tout en occasionnant la paralysie de la justice corrective et la disparition de la justice commutative. Cela est la cause des guerres et des luttes incessantes, la situation que Thomas Hobbes décrit comme « une société où les passions règnent, la guerre est éternelle, la pauvreté est insurmontable, la crainte ne nous abandonne jamais (…) et la brutalité nous ôte toutes les douceurs de la vie ». Comment en arrive-t-on à ce niveau ?

A proprement parler, même s’il y a une relation de nécessité entre le bonheur de l’individu et celui de la communauté, c’est toujours une tâche manifestement plus importante et plus parfaite d’apprendre et de sauvegarder le bonheur de la communauté : car le bonheur est assurément aimable même pour un individu isolé, mais il est plus aimable lorsqu’il est pour toute la communauté humaine. Cela revient à dire que, dans les conditions normales, sur le plan social, l’individu a toujours une valeur irremplaçable, mais cette valeur n’est aucunement une fin ; au dessus de l’individu, il y a toujours la communauté, étant donné la finitude de la condition humaine.

Dans cette optique, si Descartes décline « je pense, donc je suis » c’est parce qu'il croît que l'esprit humain, et particulièrement sa faculté de raison, est le premier critère pour accéder à la vérité. Ce n’est point à dire que l’être de l’homme dépend exclusivement de sa pensée. Sinon, s’il fallait compléter ce « je suis », le complément le plus convenable serait « limité par la condition humaine» et donc dire : « Je pense donc je suis limité par la condition humaine ». En cela, on aurait pu éviter toutes les dérives modernistes qui, en prétendant libérer l’homme de l’absolu, l’ont enfoncé, tellement que les postmodernistes, en leur qualité de descendants des modernistes constatent, amèrement que le monde peut mourir.

L’exaltation d’un sujet prétendument omnipotent engendre les concurrences et les clivages de tout genre, le fractionnement éthique. C’est un phénomène qui conduit au délitement progressif des institutions pour finir à la disparition totale de toute lueur du bonheur de l’homme.

2. L’originalité de la philosophie de saint Thomas

2.1. Saint Thomas d’Aquin et la question de la vérité

Rappelons d’emblée, que Saint Thomas d’Aquin est communément connu comme un penseur qui a esquissé les 5 voies naturelles de preuve de l’existence de Dieu. Nous n’allons pas revenir sur ces 5 voies. Mais, les considérations que nous allons mettre en évidence ci-après sont largement tributaires de ce principe même de l’existence de Dieu, prouvée naturellement par la raison humaine. Commençons par la question de la vérité.

Pour définir la vérité, Saint Thomas distingue d’abord la connaissance d’un objet qu’un sujet pensant peut avoir sur cet objet (le réel) de l’objet lui-même (le réel), en tant que réalité extra-mentale. Après cette distinction, il conclut que la vérité est une correspondance intellectuelle entre le réel et l’esprit qui le pense. C’est pour cette raison que la vérité demeure même quand les objets sont disparus. Thomas d’Aquin est très clair à ce sujet dans son traité De veritate : « Même s’il n’y avait plus d’intellects humains, les choses pourraient être dites vraies à cause de leur relation à l’intellect divin. Mais si, par quelque impossible supposition, l’intellect n’existait pas et que les choses continuaient d’exister, alors la notion de vérité, ne subsisterait plus d’aucune façon ».

Il en découle que, sans esprit, la vérité n’existe donc plus. Il n’y aurait plus que des choses, sans notion de vérité. Autrement dit, le réalisme de la vérité implique qu’il existe un esprit tel que si, par impossible, tout autre esprit disparaissait, la vérité demeurerait en ce dernier esprit subsistant. Cet esprit, c’est l’esprit de celui que nous appelons Dieu. C’est ce qu’a bien compris Hilary Putnam, quand il explique que le réalisme métaphysique et la théorie bimillénaire de la vérité-correspondance dépendent de ce qu’il appelle le point de vue de Dieu.

En fait, la vérité est d’abord dans l’esprit divin qui connaît parfaitement et en qui être et connaître coïncident de façon que l’on peut dire que Dieu est la Vérité. Elle est, ensuite, de façon secondaire, dans l’esprit humain qui connaît la vérité en tant que mesuré par l’esprit divin. Enfin, elle est dans les choses, mais de façon secondaire et impropre, au sens où les choses sont telles qu’elles sont pensées par l’esprit qui pose un jugement vrai à leur égard. L’esprit humain, quant à lui, il est fondamentalement un esprit en quête de vérité. Et il la découvre progressivement dans tous les registres du réel dans lesquels il vit. Son travail consiste à articuler tout ce qu’il découvre de vrai au sein d’un savoir unifié, travail toujours à poursuivre et à reprendre.

Bien souvent, une découverte faite dans un champ du réel semble en contradiction avec la connaissance que l’on en a à partir d’un autre champ. La découverte du fait que la Terre n’est pas plate a été un bouleversement dans le champ de la connaissance astronomique, mais aussi dans les champs anthropologique et théologique. Et il a fallu du temps pour que cette connaissance soit intégrée au sein d’un savoir nouveau, unifié. Cette unité est le but poursuivi par la raison humaine, et elle ne peut être acquise une fois pour toutes. Elle est toujours à chercher, avec les moyens limités dont on dispose. 

2.2. Saint Thomas d’Aquin et la question de la loi

Thomas d’Aquin reprend l’idée d’Aristote selon laquelle les communautés sont naturelles, c’est-à-dire correspondent à un besoin, celui de protection mutuelle. A partir de là, il distingue 4 formes de droit, et à chaque droit correspond une loi propre et distincte : il y a le droit divin qui est inaccessible à la raison humaine et qui donne lieu à la loi éternelle ; le droit naturel qui est accessible à la raison humaine et qui donne lieu à la loi naturelle ; le droit positif divin qui est celui de l’Église et qui donne lieu à la loi divine et enfin, le droit positif humain qui est établi par les hommes et qui donne lieu à la loi positive. Nous allons faire une brève présentation de chacune de ces lois, selon Saint Thomas d’Aquin.

De la loi éternelle : La notion de la loi est l’une des thèmes majeurs qui ont retenu l’attention de Saint Thomas d’ Aquin. D’emblée, il retient que la loi n’est pas autre chose qu’une prescription de la raison pratique chez le chef qui gouverne une communauté parfaite. Après cela, il pose un préalable selon lequel, le monde est régi par la providence divine. Ces deux considérations conduisent à l’évidence selon laquelle, toute la communauté de l’univers est gouvernée par la raison divine. Cette dernière ne conçoit rien dans le temps, mais plutôt a une conception éternelle. Cette conception éternelle de la loi divine a raison de loi éternelle, parce qu’elle est ordonnée par Dieu au gouvernement des choses qu’il connaît d’avance. La fin que poursuit le gouvernement divin est Dieu lui-même, et sa loi n’est pas autre chose que lui-même. Aussi la loi éternelle n’est nullement ordonnée à une autre fin qu’elle-même.

De la loi naturelle : Selon la démonstration de Saint Thomas, l’existence de la loi éternelle ne va pas sans implications. En fait, la loi, étant une règle et une mesure, peut se trouver en quelqu’un d’une double manière : tout d’abord comme en celui qui établit la règle et la mesure ; et en second lieu comme en celui qui est soumis à celle-ci, puisque ce dernier est réglé et mesuré par cette loi. Cela revient à dire que tous les êtres qui sont soumis à la providence divine sont réglés et mesurés par la loi éternelle. En plus, en recevant l’impression de cette loi en eux-mêmes, ils possèdent des inclinations qui les poussent aux actes et aux fins qui leur sont propres. Cette inclination est plus explicite lorsqu’il s’agit de la créature raisonnable qui est soumise à la providence divine. C’est une telle participation de la loi éternelle qui, dans la créature raisonnable, est appelée loi naturelle ; c’est-à-dire, une participation de la loi éternelle dans la créature raisonnable.

De la loi humaine : La loi naturelle, telle qu’elle est démontrée à partir de la loi éternelle, contient, en quelques façons, préceptes de la loi naturelle qui sont comme des principes généraux et indémontrables, aboutissant à certaines dispositions plus particulières. La connaissance de ces principes généraux et indémontrables, loin d’être innés, résultent de l’activité de notre esprit, ou tout simplement de notre raison. Ces dispositions particulières découvertes par la raison humaine sont appelées lois humaines, du moment que nous retrouvons en elles les autres conditions qui intègrent la notion de loi, selon les explications déjà données. C’est pourquoi Cicéron déclare : « L’origine première du droit est produite par la nature ; puis, certaines dispositions passent en coutumes, la raison les jugeant utiles ; enfin ce que la nature avait établi et que la coutume avait confirmé, la crainte et la sainteté des lois l’ont sanctionné ».

De la loi divine : A la différence d’autres créatures, l’homme est ordonné à une fin ultime qui dépasse de loin ses propres capacités naturelles, les ressources naturelles des facultés humaines. Dans cette optique, la loi naturelle ainsi que la loi humaine qui lui est dérivée deviennent incapables de tenir la direction de la vie humaine. Donc, il est nécessaire qu’au-dessus de la loi naturelle et de la loi humaine il y eût une loi donnée par Dieu pour diriger l’homme vers sa fin. Privé de la lumière divine, le jugement humain est incertain, principalement quand il s’agit des choses contingentes et particulières ; par conséquent, ces jugements produisent des lois disparates et opposées. Pour que l’homme puisse connaître sans aucune hésitation ce qu’il doit faire et ce qu’il doit éviter, il est nécessaire qu’il soit orienté, pour ses actes propres, par une loi donnée par Dieu.

2.3. Esquisse d’évaluation de la pertinence de Saint Thomas

A voir de près, la pensée thomiste, en ce qui concerne la nature de la vérité comme correspondance ou adéquation entre le réel et l’intellect ; la loi éternelle et la loi divine, a connu une progressive perte d’influence, depuis un peu plus d’un siècle. Son rôle dans l’articulation du sens s’est estompé pour laisser place à des perspectives nouvelles. Pour ce qui de l’organisation des communautés humaines, son travail est souvent taxé de syncrétisme politico-religieux légitimant les monarchies religieuses. Thomas d’Aquin place sa pensée dans un contexte multiple. Il connaît toutes les œuvres des grecs et tentera, toute sa vie, de concilier les acquis de la philosophie grecque (surtout d’Aristote) et la Révélation Divine. C’est vrai que le thomisme a sans doute fait autorité dans tous les milieux religieux, est-ce vraiment une limite ou un mérite ?

Un regard rétrospectif situe cette question à l’époque de la Renaissance et de la Réforme au XV et XVIème siècle. Cependant, elle a été différenciée par la Révolution française et plus précisément avec le Contrat Social ou Principes du droit politique de Jean-Jacques Rousseau. Ce dernier, pour atteindre le bonheur, il recommande, entre autres, la renonciation aux droits naturels au profit de l’État, qui, par sa protection, conciliera l’égalité et la liberté ; le peuple tout-puissant qui doit sauvegarder, par le truchement d’un législateur, le bien-être général contre les groupements d’intérêts, la démocratie qui doit maintenir sa pureté par des assemblées législatives et la création d’une religion d’État, ou religion civile. Au sein de la République, c’est-à-dire toute société régie par la loi ou qui est gouvernée par la volonté générale de son peuple, tout est régi par un droit civil en tant qu’acte de la volonté générale, selon Rousseau, et la volonté générale doit être obéie par tous. Ainsi, disparaissent sous l’horizon tout ce qui relève de la loi éternelle, divine voire naturelle ; tout ce qui relève du bonheur dépend exclusivement de l’homme.

Pourtant, si fort que puisse paraitre, l’être humain est soumis à une finitude incontournable. Kant disait en effet, « Deux choses remplissent le cœur d'une admiration et d'une vénération toujours nouvelles et toujours croissantes à mesure que la réflexion s'y attache et s'y applique : le ciel étoilé au-dessus de moi et la loi morale en moi. Ces deux choses, je n'ai pas besoin de les chercher et de les conjecturer comme si elles étaient enveloppées de ténèbres ou placées dans une région transcendante en dehors de mon horizon ; je les vois devant moi et je les rattache immédiatement à la conscience de mon existence ».

Le spectacle du ciel étoilé renvoie à cette multitude innombrable de mondes qui nous entourent et qui anéantissent l’importance de tout un chacun en tant créature animale qui doit rendre la matière dont elle est formée à la planète, après avoir été pendant un court espace de temps doué de force vitale. Au contraire, le spectacle de la loi morale élève infiniment la valeur de l’homme comme celle d'une intelligence et le représente dans un monde qui a une véritable infinité, où l’homme se reconnait lié par une connexion, non plus comme dans la première simplement contingente, mais universelle et nécessaire.

En tout, aux dires de Kant, en se privant du lien intérieur avec un monde qui a une véritable infinité, l’être humain se condamne à une contingence qui ne fait qu’aggraver les limites de la condition humaine. Quoi qu’il en soit la loi éternelle ainsi que la loi divine qui lui est dérivée réclament de l’homme une obéissance absolue sans laquelle la vie devient pratiquement impossible. Telle est, à notre sens, la pertinence de la pensée de Saint Thomas, que l’on soit de la mouvance scholastique ou moderne, contemporaine ou postmoderne, noir ou blanc ; nous en avons eu les preuves, nous en avons et nous en aurons encore.

3. La thérapie thomiste de quelques questions sociétales

3. 1. Conversion à la vérité

D’après Jean Staune, « il s’est passé au XXème siècle quelque chose d’inouï, d’inégalé depuis cinq cents ans, depuis le passage du monde magique du Moyen Âge à celui de la modernité, via la Renaissance : l’émergence d’un nouveau paradigme ayant une influence sur tous les domaines de la connaissance ». « En effet, nous sommes, face à un bouleversement épistémologique d’une grande ampleur : désormais, nous savons parfaitement et avec une grande précision pourquoi nous ne saurons jamais certaines choses.» Notre connaissance est bien plus limitée que nous le pensions.

Cette situation induit beaucoup de personnes, de catégories diverses dans l’erreur de croire que la vérité en soi n’existe pas ou tout simplement qu’elle existe selon les critères de tout un chacun ; le relativisme : d’où appel à la conversion à la vérité. Cette conversion passe par l’humilité vis-à-vis de Dieu. La constatation selon laquelle notre connaissance est limitée doit plutôt nous enseigner une saine humilité. Car si tout n’est pas connu, certaines choses le sont. L’être humain est capable de connaître par sa raison un certain nombre de vérités, et, parmi celles-ci, il y a notamment celles de la loi naturelle, susceptibles de guider tout être humain sur les chemins de la vie morale, pourvu que sa conscience soit suffisamment éclairée.

La conversion à la vérité demande à ce que l’homme, qui qu’il soit, ne prétende être détenteur de la vérité, en sa propre qualité d’homme. Seule Dieu est à mesure de revendiquer cette qualité. Quant aux hommes, nous ne disposons que de la vérité de façon secondaire, dans la mesure où nous sommes dans la mouvance de l’esprit divin au moment où les choses disposent la vérité de façon secondaire et impropre. La vérité comprise et référée à l’esprit divin facilite l’harmonie entre Dieu, les hommes et les choses. L’esprit humain est un esprit limité qui utilise des méthodes limitées pour avancer humblement vers la vérité.

3.2. Conversion à la logique de la loi.

Étant donné la nécessité de la loi au sein des communautés humaines, il est urgent de rappeler l’homme postmoderne que la loi, et la loi divine en particulier procure le bonheur. Dans chaque communauté humaine, l’existence de la loi constitue un élément essentiel pour le bonheur de tous. Comme nous venons de l’évoquer, ci-haut, pendant le XXème siècle, le monde a vécu un changement profond qui aurait conduit pas mal de personnes au relativisme, vis-à-vis de la vérité. Or la vérité, chez Saint Thomas, telle que nous l’avons démontré, c’est Dieu lui-même. Nous avons vu aussi que, la loi éternelle qui légitime, successivement, les lois naturelle, humaine et divine, se fonde sur providence divine qui gouverne le monde. Ainsi, le relativisme de la vérité a impliqué le relativisme de la loi éternelle, de la loi humaine et de la loi divine.

Dans une communauté où la logique de la loi et son importance n’est prise en considération que partiellement ou tout simplement aucune loi n’est prise en considération, la vie devient impossible et le bonheur tant désiré disparait définitivement. A voir de plus près, par l’usage de la raison, la quête du bonheur sans Dieu pousse l’homme postmoderne à se contenter de la loi humaine tout en écartant la loi divine. Pourtant, les lois humaines ne peuvent pas posséder l’infaillibilité. Ces derniers temps la tendance des sociétés humaines ayant un style de vie autonome est passée de façon lente et progressive, des communautés aux individus, passant par les familles unitaires.

La réclamation de l’autonomie ne se fait plus seulement contre la loi divine mais aussi contre la loi naturelle et la loi humaine. Il n’est presque plus étonnant dans certains cas, que, dans une même famille, chaque membre (enfant ou parent) ait son ordre propre à lui. Ceci rend pratiquement impossible le vivre ensemble, au sein des familles. Au niveau des familles biologiques, cette situation donnent lieu aux cas divers, notamment les suicides, les divorces, la consommation des drogues qui, dans l’ensemble détruisent le tissu social.

Au niveau des grandes entités sociales et religieuses, l’absence de la logique de la loi et de son importance, accroît l’égoïsme et le narcissisme, le chauvinisme et le fanatisme pour finir aux luttes internes cruelles. A l’intérieur des États, le fléau de la négation du sens de la loi peut apparaître sous plusieurs formes. Il peut s’agir, tantôt des révoltes inutiles et sans raison, des oppressions inhumaines et des tortures, des corruptions et des démagogies, des radicalisations et des idéologies, des guerres politiques et économiques. Tout cela engendre la hantise et la panique sans cesse etc. Lors que le fléau attaque les nations, ce sont des guerres qui éclatent et la situation devient beaucoup plus alarmante.

3. 3.Conversion à la hiérarchie des valeurs des lois

A la lumière de Saint Thomas, l’évènement des communautés susceptibles de pourvoir le bonheur aux hommes dépendrait de la conversion des membres de ces mêmes communautés à la hiérarchie des valeurs des lois et des personnes. L’existence de l’homme est ordonnée à la quête du bonheur en tant qu’un bien par excellence. Pour une part considérable, le bonheur de l’homme dépend de lui. Étant en communauté avec les autres, son bonheur dépend aussi des autres. Pour y parvenir, il faut observer plusieurs lois, nous les avons explicitées. Il y a la loi éternelle, la naturelle, la loi humaine et la loi divine. Ces lois entretiennent une dépendance nécessaire entre elles. Tout part de la loi éternelle, puis la loi naturelle, la loi humaine et enfin la loi divine qui, bien que dernière, sert de concrétisation de la loi éternelle. Cela ne va pas sans implications vis-à-vis des choix existentiels.

En effet, dans une époque où la simple raison humaine veut tout déterminer, la tentation de placer la loi humaine au dessus de toutes les autres est grande. Pourtant, « l’homme ne peut porter de loi que sur ce dont il peut juger. Or le jugement humain ne peut porter sur les mouvements intérieurs qui sont cachés, mais seulement sur les actes extérieurs qui se voient. Pourtant il est requis pour la perfection de la vertu que l’homme soit rectifié dans ses actes aussi bien intérieurs qu’extérieurs. C’est pourquoi la loi humaine ne pouvait réprimer et ordonner efficacement les actes intérieurs ; et c’est ce qui rend nécessaire l’intervention d’une loi divine. »

Plus encore, Le jugement humain est incertain, principalement quand il s’agit des choses contingentes et particulières ; c’est pourquoi il arrive que les jugements portés sur les actes humains soient divers, et que, par conséquent, ces jugements produisent des lois disparates et opposées. Pour que l’homme puisse connaître sans aucune hésitation ce qu’il doit faire et ce qu’il doit éviter, il nécessaire qu’il soit dirigé, pour ses actes propres, par une loi donnée par Dieu ; car il est évident qu’une telle loi ne peut contenir aucune erreur.

Cela étant, en cas de conflits entre des lois, il faut toujours savoir laquelle a préséance par rapport à l’autre. Par exemple, la loi humaine qui contredit la loi naturelle et/ou divine ne devrait pas être respectée car, le bien consiste donc à respecter l’ordre naturel établi par Dieu.

Tout de même, la personne qui reçoit un mandat de veiller à ce que les lois soient bien respectées dans une communauté quelconque, étant lui-même soumise aux limites de la condition humaine, ne devrait pas se sentir au-dessus de la loi, surtout lorsqu’il s’agit de la loi naturelle et/ou divine.

Conclusion

Au cours de notre réflexion sur la quête du bonheur dans les limites de la condition humaine, voulant savoir ce que peut être l’apport de Saint Thomas, nous sommes partis de l’historique de la problématique de bonheur en tant que tel. En effet, depuis les siècles les plus reculés, l’homme aspire au bonheur si bien que, ce dernier serait l’objectif de la plus ancienne entreprise de l’homme ; constituer une communauté sociale.

La raison en est que la condition humaine est parsemée de contrariétés que l’on ne saurait pas écarter sans concours mutuels des uns et des autres. Cet effort de se procurer le bonheur en élargissant les limites de la condition humaine perdure et accompagne l’homme tout au long de son histoire ; c’est la politique au sens le plus large du terme. Le fait de se mettre ensemble dans une communauté politique ne suffit pas pour atteindre le bonheur, il faut, la pratique de la vertu, notamment la justice, il faut toute une éducation, bref, il s’agit d’une panoplie au contenu divers et multiple.

Hélas, depuis l’antiquité jusqu’à nos jours, le bonheur tant désiré semble ne pas être au rendez-vous. Plus encore, en ces débuts du XXIème siècle, beaucoup d’entités, tant culturelles, politiques, géographiques voire religieuses menacent de s’écrouler. A l’heure de la postmodernité, bien des gens semblent vivre l’expectative de la fin imminente de ce qui a été depuis des années le berceau de leurs existences et n’hésitent pas de le crier ouvertement.

Considérant l’ampleur de la situation, nous avons voulu revisiter la pensée de Saint Thomas afin de nous procurer de lui un certain nombre de thérapies contre cette crise. Nous avons exploré le thème de la vérité. Après avoir posé le principe selon lequel la vérité est une correspondance intellectuelle entre le réel et l’esprit qui le pense, il en arrive à l’évidence selon laquelle, Dieu est Vérité, car seul Dieu, étant donné sa providence envers l’univers, peut avoir la vérité de tout être quand bien même ce dernier ne serait pas encore existant ou cesserait d’exister, lui en fait est éternelle.

De cette éternité, découle une loi éternelle qui, à son tour, permet l’existence d’une loi naturelle. Partant des principes de la loi naturelle, l’homme est à mesure de formuler la loi humaine. Cette dernière nécessite une loi divine qui, partant de la loi éternelle, est capable de l’éclairer. Telle est la structure des lois qui puissent conduire l’humanité au bonheur. Cependant, une telle structure basée fondamentalement sur l’existence de Dieu pourrait ne pas satisfaire l’un ou l’autre. Pourtant, mise aux cribles de certains auteurs qui ne s’intéressent pas explicitement à la question de Dieu, elle devient beaucoup plus limpide. Le principe de la volonté générale que Jean-Jacques Rousseau a proposé n’a jamais été vraiment à même de garantir le bonheur. Quant à la découverte de Kant selon laquelle l’homme est en même temps soumis à l’immensité de l’univers et relevé par la loi morale en lui, ne fait que l’homme ait toujours besoin d’une référence qui lui soit supérieure.

Comme thérapie, il faut d’abord la conversion à la vérité. La vérité est l’autre nom de Dieu.

Il faut, avoir le courage de contempler la vérité telle qu’elle est sans concession aucune et agir en connaissance de cause. Il faut la conversion à la logique de la loi. L’absence de la logique de la loi est ce qu’il faut enlever pour qu’une communauté cesse d’exister. Toute personne, physique ou morale qui ne reconnaît rien ni personne qui lui soit supérieur perd une grande possibilité d’accès au bonheur. Si l’on aspire au bonheur, il faudra toujours mener une vie régie et rythmée par la loi éternelle, naturelle, humaine et divine.

Regard à l’intérieur de la pensée de Saint Thomas d’Aquin pour mieux étaler et orienter la conscience morale aujourd’hui en crépuscule

Par Fratri Alexandre NIYONGABIRE

Introduction

Une morale qui veut être autre chose qu’une doctrine particulariste et qui souhaite échapper au relativisme des cultures devra forcement découler d’un principe intellectuel pur. Puisque seul l’entendement peut être source d’universalité et de la nécessité, c’est vers lui qu’il faut manifestement se tourner pour dénicher le principe moral

Partant de cette remarque de Kant, nous retenons que la morale doit découler nécessairement de la raison. C’est pourquoi son histoire est très intéressante considérant le rôle important de la philosophie morale ambitieuse de donner aux individus et souvent aux peuples, une règle de conduite selon un idéal rationnel. Et, Saint Thomas d’Aquin est une figure réaliste dans cette histoire. Théologien et philosophe médiéval, Saint Thomas d’Aquin offre aussi des perspectives qui peuvent être appliquées aux problèmes actuels en matière de la morale. Il est important de noter qu’il a vécu au XIIIème siècle et que ses écrits reflètent le contexte moral et socio-intellectuel de cette époque. Par conséquent, il ne traite pas directement des crises spécifiques auxquelles nous sommes confrontées aujourd’hui dans ces domaines. Cependant, il est possible de tirer de sa pensée des enseignements qui peuvent avoir une pertinence dans notre contexte actuel.

Du XIIIème siècle jusqu’à nos jours, l’influence de Saint Thomas d’Aquin et de sa pensée philosophique ne cesse de valoir. Il a joué un grand rôle en matière de la philosophie surtout en métaphysique, philosophie morale et dans d’autres domaines de la philosophie. De son éthique, c’est vrai qu’il y a encore les traces dans cette société hypermoderne, mais à cause du relativisme contemporain, quelque fois on la met à côté. Il est donc légitime aujourd’hui de se poser quelques questions: Quelle serait la validité de la pensée thomiste face à la crise morale postmoderne et quelles en seraient les implications ? Comment orienter la pensée thomiste dans cette société nostalgique dans laquelle la conscience morale est en crépuscule ? Pour répondre à ces interrogations, dans cet article nous allons étudier la conscience morale en essayant de la contextualiser face à la crise morale actuelle. Nous nous appuyons sur la philosophie morale de Saint Thomas d’Aquin.

L’objectif de cet article n’est de faire à personne mémoriser par cœur ni l’histoire ni un ensemble de termes techniques, mais bien de familiariser le lecteur avec Saint Thomas d’Aquin et de stimuler son goût pour la réflexion et les interrogations philosophiques sur cette société marquée par la crise de la conscience morale. Et, comme il y a pas mal de difficultés qui frappent les gens dans le champ de la vie spécialement morale actuelle, ce sujet aidera le lecteur à avancer peu à peu, dans l’effort de chercher comment résoudre des problèmes éthiques plus pertinents dans les différents aspects de la vie de l’homme actuel en écoutant sa conscience morale. Tel sera le mouvement de cet article.

1. La conscience morale selon Saint Thomas d’Aquin

Saint Thomas d’Aquin a abordé la question de la conscience morale dans le cadre de sa philosophie morale et de sa théologie. Selon lui, la conscience est un sujet complexe et multifacette. Elle est la faculté qui nous permet de discerner le bien et le mal, et d’évaluer la moralité de nos actions. Elle est un acte intérieur par lequel nous jugeons si une action est bonne ou mauvaise. On retient seulement qu’elle vise le bien. Saint Thomas d’Aquin affirme que la conscience est une participation à la sagesse divine, nous permettant de comprendre les lois éternelles et naturelles qui guident notre conduite morale. Comme Kant le montre : « La conscience est un instinct qui juge de manière exécutoire d’après les lois morales. Elle prononce une sentence et tout comme un juge ne peut que punir ou acquitter mais non récompenser le prévenu, la conscience nous déclare coupables ou innocents ».

Ainsi, comme : « la conscience est toujours la relation où des termes ne se posent relativement en soi que par la suspension de son activité », elle nous oriente vers le bien et nous incite à agir en accord avec la volonté divine. Saint Paul l’exprime ainsi : « Ecoutez la conscience morale ! Ne vous laissez pas vaincre par le mal, mais surmontez le mal par le bien » (Rm 12 : 21). Cependant, Saint Thomas d’Aquin souligne également que la conscience peut être erronée, c’est-à-dire qu’elle peut juger quelque chose comme étant bon alors qu’il s’agit en réalité d’une erreur. Il explique que cela peut venir de différentes raisons, telles que l’ignorance, le mauvais usage de la raison ou des influences externes néfastes. En ce qui concerne la formation de la conscience, il considère que la connaissance approfondie de la loi morale et la pratique des vertus sont essentielles.

Il souligne également l’importance de la formation de la conscience par l’éducation et l’enseignement moral. Par conséquent, pour Saint Thomas d’Aquin, la conscience est intimement liée à notre capacité de jugement moral et à notre engagement vers le bien. Il insiste sur la nécessité d’une conscience bien formée et éclairée par la sagesse divine pour agir de manière juste et morale car la morale est un instinct divin qui est immortel. Selon lui, en bref, la conscience morale joue un rôle important dans la vie de chacun en tant que guide pour distinguer le bien du mal et pour orienter nos actions. Elle permet à l’homme de prendre des décisions éclairées en conformité avec la loi naturelle.

2. La problématique de la conscience morale dans l’hypermodernité

De prime abord, la problématique de la conscience dans l’hypermodernité concerne les questions liées à notre capacité de conscience et de perception dans un monde caractérisé par la crise morale, la technologie, la mondialisation, la virtualité et l’accélération du rythme de vie où, « dans la société de type individualiste-bourgeois il n’y a pas d’œuvre commune à faire et il n’y a pas non plus de communion ». En effet, la periode hypermoderne dans laquelle nous vivons est marquée par un développement exponentiel de la technologie qui a des répercussions sur notre perception de nous-mêmes et du monde qui nous entoure. Cette hyperconnectivité permanente et la pléthore d’informations auxquelles nous sommes exposés peuvent altérer notre capacité de concentration et de réflexion, favorisant ainsi une forme de distanciation par rapport à notre propre conscience qui est : « comme une essence éternelle, hors du temps, dont toutes les manifestations dans le temps ne sont que des attributs ». Nous sommes constamment sollicités par des notifications, des réseaux sociaux, des publicités, et il devient de plus en plus difficile de trouver des moments de calme et de recul nécessaires à la prise de conscience.

L’hypermodernité est marquée par une accélération du rythme de vie grâce à la conscience considérée comme la coutume qui est le guide principal de la vie humaine. Les technologies nous permettent d’aller plus vite, de communiquer instantanément et de satisfaire nos besoins immédiatement. Cependant, cette accélération nous éloigne de notre conscience profonde et nous empêche de savourer l’instant présent. Nous sommes constamment préoccupés par le futur, par la prochaine tâche à accomplir, et il devient difficile de se connecter à soi-même et d’apprécier les moments de tranquillité et de réflexion.

De plus, l’hypermodernité est également caractérisée par une uniformisation des modes de vie, des cultures et des expériences. Elle est caractérisée aussi par la diminution de l’empathie, de la compassion envers les autres et une tolérance accrue envers les comportements immoraux. Cependant, malgré les avancées technologiques et les changements sociaux, la conscience morale continue d’être un élément essentiel de la vie individuelle et collective. Elle reste un pilier essentiel de la vie humaine et de la construction d’une société juste et équilibrée. Il est mauvais de chercher à s’excuser en invoquant les erreurs de conscience. La conscience morale est le sens de l’Idéal et des valeurs susceptibles de justifier la vie en dignité. Elle est le sens du devoir, de l’obligation, et de la responsabilité. Elle est aussi le pouvoir d’apprécier et de juger la conduite selon le critère du permis et du défendu.

Bref, la problématique de la conscience morale dans l’hypermodernité interroge notre capacité à conserver une conscience individuelle à prendre du recul critique sur le monde qui nous entoure, car, comme Durkheim le disait : « quand notre conscience parle, c’est la société qui parle en nous », et à apprécier l’instant présent au milieu d’un flux constat d’informations et de sollicitations. Mais puisque les gens agissent contrairement à la conscience morale, en disant qu’ils sont libres, il est utile et important de jeter un coup d’œil sur la liberté en rapport avec cette conscience morale.

3. Conscience morale et liberté

3.1. La liberté selon Saint Thomas d’Aquin

La question de la liberté occupe une place centrale dans la pensée de Saint Thomas d’Aquin. Il la considère comme une caractéristique essentielle de la nature humaine, liée à notre capacité de choisir et d’agir de manière autonome. Pour lui, la liberté ne consiste pas simplement à faire ce que nous voulons, mais plutôt à agir conformément à notre nature rationnelle et à notre bien véritable. Il soutient que la véritable liberté est liée à la volonté et à la raison car : « la liberté comme libertas arbitrii, n’est possible que parce qu’elle s’enracine dans la raison », et non à la simple poursuite des désirs ou des impulsions. Selon Saint Thomas d’Aquin, l’homme est libre lorsqu’il exerce sa volonté en conformité avec la raison. Dans le même sillage, LE SENNE dit que : L’homme libre sera heureux de vivre dans la compagnie d’autres hommes libres en s’unissant avec eux dans la communauté intelligible de la raison ; mais s’ils se livrent aux passions, il ne se jugera pas lâche d’éviter leur société. C’est pour cela que Saint Thomas affirme que la raison est un guide pour la volonté, elle nous permet de discerner ce qui est bon et de le choisir en conséquence. Cependant, il reconnaît également que la volonté de l’homme peut être influencée par les désirs désordonnés ou des passions, ce qui peut altérer sa liberté.

En ce qui concerne la relation entre la liberté humaine et la grâce divine, Saint Thomas d’Aquin affirme que la grâce ne détruit pas la liberté, mais la perfectionne plutôt en harmonisant la volonté humaine avec la volonté divine. Selon lui, la grâce divine est nécessaire pour guider et soutenir la volonté humaine dans la recherche du bien véritable. Il convient de noter que la pensée de Saint Thomas d’Aquin sur la liberté a été influencée par la philosophie aristotélicienne, qui met l’accent sur la recherche du bien et de la vertu. Il a également pris en compte les enseignements de l’Eglise Catholique sur la liberté et la grâce. En résumé, pour Saint Thomas d’Aquin, la liberté consiste à agir en accord avec la raison et à rechercher ce qui est véritablement bon. Il reconnaît que la volonté peut être influencée par des désirs désordonnés, mais il affirme aussi que la grâce divine peut nous aider à exercer notre liberté de manière juste et morale.

3.2. Liberté de la conscience morale

Quand un homme ne connaît pas les lois de l’univers, il se croît libre, mais par la même, à cause de son inconscience, il est jouet des événements. Quant au contraire il comprend la nécessité universelle, il sait qu’il n’est pas libre, mais il connaît la raison des événements…

Il est vrai que la liberté de la conscience morale est un droit fondamental qui garantit à chacun le droit de penser, de croire, de choisir sa religion ou ses convictions, sans subir de contrainte ou de persécution. Ce principe repose sur le respect de la liberté de pensée et de croyance de chaque individu et sur la non-ingérence de l’état ou de tout autre acteur dans les choix et les convictions des individus. La liberté de la conscience inclut également la liberté d’exprimer ses opinions, ses croyances et ses convictions, tant qu’elles ne portent pas préjudice à autrui ou ne violent pas les droits des autres.

Alors, la liberté de conscience morale est un principe fondamental qui reconnaît à chaque individu le droit de déterminer ses propres valeurs morales, en accord avec sa propre conscience. Cela implique le droit de penser librement, de se forger sa propre éthique, et de prendre des décisions sans contrainte extérieure.

Finalement, la liberté de la conscience morale est reconnue par plusieurs traités internationaux et constitutions nationales, en tant que droit universel et inaliénable. Elle est souvent considérée comme l’un des piliers de la démocratie et des droits de l’homme, car elle permet à chaque individu d’exprimer librement sa pensée, de critiquer les dogmes ou les croyances établies, et de contribuer à la diversité et à la pluralité des opinions. Toutefois, elle n’est pas absolue et peut être limitée dans certaines circonstances. Par exemple, lorsque les croyances ou les pratiques religieuses entrent en conflit avec d’autres droits fondamentaux, comme la liberté d’expression, la non-discrimination, il peut être nécessaire d’imposer des restrictions pour trouver un équilibre entre ces différentes valeurs.

3.3. Relation entre la liberté et la conscience morale : naviguer sur les chemins de Saint Thomas d’Aquin.

Pour Saint Thomas d’Aquin, la liberté et la conscience morale sont étroitement liées. Selon sa philosophie de l’être humain, la conscience morale est la faculté à travers laquelle l’homme est capable de discerner le bien et le mal, et de prendre des décisions en fonction de cette distinction. La liberté, quant à elle est la capacité de l’être humain d’agir selon sa propre volonté. Pour lui, la liberté est un don de Dieu qui permet à l’homme de choisir librement entre différentes options qui se présentent à lui, surtout quand il s’agit de choisir entre le bien et mal.

Ensuite, Saint Thomas d’Aquin affirme que la conscience morale est le guide de la liberté. En discernant entre le bien et le mal, la conscience permet à l’homme de choisir de manière éclairée et responsable. La conscience moralise la liberté en indiquant les limites dans lesquelles celle-ci peut s’exercer de manière juste et vertueuse.

La conscience, selon lui, est également un moyen pour l’homme d’atteindre la vérité et de se rapprocher de Dieu. En écoutant sa conscience morale et en agissant en fonction de ses convictions morales, l’homme est en accord avec la volonté divine et peut trouver le bonheur et la satisfaction spirituelle. Enfin, la conscience est bien une source de liberté par le pouvoir qu’elle nous donne sur le reste du monde. Néanmoins, avec la conscience morale apparaît la loi morale et de multiples interdits vont peser sur mes actions : si j’agis consciemment, je deviens responsable de ce que je fais, et l’on peut me punir si j’agis mal. La conscience de soi rend libre à condition de devenir un véritable savoir.

4. L’écho de Saint Thomas d’Aquin dans le vide moral de la société hypermoderne?

L’époque contemporaine est une époque de grande confusion et de troubles. C’est une époque dans laquelle la conscience morale est en crise. Les guerres et les conflits se poursuivent sans relâche et d’innombrables phénomènes alarmants et tragiques, notamment le terrorisme, les incendies criminels, les enlèvements et les meurtres. Au milieu de cette tourmente, les biens les plus précieux de l’humanité sont désormais presque anéantis. Ceci, fait référence à la perte de la dignité humaine, à la perte des traditions ancestrales, à la perte de la confiance mutuelle entre les hommes, etc. Cela montre bien que la conscience morale est en déclin car cette époque est marquée aussi par le relativisme moral excessif, le déni de responsabilité individuelle et l’individualisme excessif, le cynisme moral, etc.

Dans cette pagaille, se trouve une question : Où est Saint Thomas dans ce crépuscule contemporain ? Il est difficile de le trouver, mais retenons que dans tout cela, sa pensée surtout morale demeure pertinente et actuelle, et qu’elle nous permet d’affronter les défis du monde contemporain comme il en est de toute pour sa pensée qui traverse tous les siècles.

Dans ce zigzag, prenons par hasard, la question de l’euthanasie qui, pourtant, n’a pas été directement abordée par Saint Thomas d’Aquin, car ce concept n’existait pas à son époque. En étudiant sa philosophie morale et sa conception de la dignité humaine, on peut en tirer quelques éléments qui peuvent servir pour aborder cette question. Saint Thomas d’Aquin considère que la vie humaine est un don précieux qui doit être préservé et respecté. Il souligne l’importance de la dignité inhérente à chaque être humain, en tant que créature de Dieu. Selon lui, l’homme est doté d’une nature rationnelle qui le distingue des autres êtres vivants et lui confère une valeur particulière. Dans ce contexte, il est possible d’interpréter la pensée de Saint Thomas d’Aquin comme étant contre l’euthanasie, vu qu’elle est pour le respect de la dignité humaine et de chaque homme. Pour lui, la vie humaine ne peut être prématurément interrompue par une action volontaire, même si les intentions sont bonnes. Il soutient que seul Dieu a le pouvoir de décider de la fin de la vie, et que l’homme ne doit pas s’arroger ce droit car Il aime ses créatures. Cependant, il est important de noter que les interprétations de la pensée de Saint Thomas d’Aquin peuvent varier et que sa philosophie morale ne traite pas directement de situations spécifiques, telles que l’euthanasie. La question de l’euthanasie est complexe et suscite des débats éthiques philosophiques et juridiques considérables, qui nécessitent une analyse approfondie des arguments et des contextes spécifiques. En fin de compte, il est essentiel de comprendre que la pensée de Saint Thomas d’Aquin ne fournit pas de réponse définitive à la question de l’euthanasie, mais peut offrir des principes moraux qui peuvent être pris en compte dans le débat.

Il y a des époques où l’humanité cherche fiévreusement à résoudre les problèmes vertigineux que lui pose la constatation et de l’univers, et d’elle-même. Il y en a où elle désespère, elle critique ses facultés de connaître et juge sévèrement leurs prétentions. Il y en a d’autres où elle croit tenir la clef du mystère.

C’est dans ce cadre-là que Saint Thomas d’Aquin a développé une approche philosophique et théologique qui a eu une influence profonde sur la pensée moderne. Il a eu une influence significative dans la société actuelle, société problématique et nostalgique de la morale caractérisée par une crise de la conscience morale dans laquelle il y a l’égocentrisme excessif, le manque d’empathie, la fuite des responsabilités et les actes immoraux.

Il importe de dire que Saint Thomas d’Aquin a développé une parage philosophique et théologique qui a eu une influence profonde sur la pensée moderne. Il exerce une influence sur la théologie morale basée sur la raison en mettant l’accent sur la recherche de la vérité et du bien à travers la raison. Son influence se manifeste à travers son engagement en faveur de la raison, de la primauté de la conscience morale, de la loi naturelle et du développement des vertus.

Ensuite, « Il faut une conception de la morale plus vaste et plus impartiale si l’on veut sérieusement chercher au-delà des apparences le sens éternel des actions humaines ». C’est dans ce sillage que dans l’éthique et moralité, la pensée de Saint Thomas d’Aquin a également eu un impact dans la société actuelle. Ses théories sur la loi naturelle et le bien commun ont été utilisées comme base pour la formulation de nombreux systèmes éthiques et moraux dans la société moderne. Ses principes, tels que la conscience morale et le respect de la dignité humaine, continuent d’avoir une influence sur les débats éthiques contemporains.

C’est dans ce sens que contextualiser le Docteur angélique face à la crise morale actuelle nécessite de prendre en compte plusieurs aspects. Ses principes éthiques et moraux peuvent être utiles pour réfléchir à la conscience morale actuellement en crise. Par exemple, sa conception de la conscience morale guide l’être humain dans ses décisions de distinguer le bien et le mal, de vivre en accord avec nos valeurs morales plus profondes. Cette conscience morale est un guide précieux dans notre quête de la vérité et de la vertu.

Conclusion

Nous vivons dans un siècle des changements et des décadences, là où la société a fait de la morale un choix personnel. Tous ceux qui veulent progresser véritablement dans la vie morale ne peuvent ni nier ni ignorer la pensée de Saint Thomas d’Aquin. Dans cet article, nous avons abordé la question de la conscience morale, qui est fondée sur la moralité objective et universelle, qui repose sur la nature humaine et la volonté divine. Selon Saint Thomas, elle n’est pas simplement déterminée par des normes sociales ou individuelles mais par les principes éthiques objectifs et absolus. Il faut donc noter qu’une bonne conscience morale est un doux oreiller, elle est une guide pour l’homme et elle ne peut avoir tort.

Et puis, la conscience morale est un principe fondamental dans la philosophie éthique, et elle joue un rôle essentiel dans la prise des décisions et dans le jugement moral. C’est pour cela qu’elle permet à l’homme de se prendre lui-même comme objet de pensée au même titre que les objets extérieurs. Elle permet de discerner le bien et le mal. Mais, l’hypermodernité, lui pose des défis toujours ; et les exigences de la vie comme la concurrence économique, la surconsommation et la pression sociale la mettent en crépuscule.

Enfin, la question de la conscience morale reste ouverte et incontournable. Même si nous n’avons pas trouvé des solutions très suffisantes à notre question de recherche, j’affirme que chemin faisant, grâce à tout ce que nous avons dit, nous avons pu reconnaître la place de la conscience morale dans ce crépuscule hypermoderne. On ne peut pas expliquer parfaitement le paradoxe qu’elle crée, sa philosophie et son pouvoir. Ce qui reste et restera, c’est qu’elle est la présence constante et immédiate de soi à soi.

A visit in Thomas Aquinas’ polity:

What should we say about thomasian socio-political philosophy?

By Symphorien Ntibagirirwa

Associate Professor of governance and leadership ethics

Institute of development and Economic Ethics

1. Introducing the issue: a look back

As a young graduate, I was interested in the old question often posed by political philosophers: what is the best form of government? I was fascinated by the answer Thomas Aquinas gave, taking into consideration the political realities of his time. In the process, I found that he noticed a question behind the question of the best form of government. It is the perennial question of “how best should we be governed?” This question is a variant of Aristotle’s moral question: “How should we live?” applied to the precise field, the political arena. The two complementary questions are recurrent today and converge in the whole issue of democracy and governance. While democracy is manifold, governance is either good or bad. Indeed, we are used to the political language of good governance and bad governance. Good governance prevails in a good regime.

This paper deals with the best form of government in Aquinas’ socio-political philosophy. It is an updated reading of Aquinas social political ideas that seeks to demarcate the idea of polity as a best form of government as a response to how best people should be governed. This is a desktop research coupled with a reading of Aquinas political writings.

Two major sections structure this paper. After this introductory note, the first section is a bird eye view on Aquinas political philosophy, its major characteristics and its major concepts. The second section dovetails on the issue of the best form of government and its guiding principles. The last section will conclude.

2. Aquinas’ political philosophy: key characteristics and concepts

There are a certain number of things expected in every department of Aquinas’ Philosophy. The first thing is that Thomas Aquinas is both a philosopher and a theologian, trying to reconcile Aristotle’s philosophy and Christianity as well as reason and faith. This made him the greatest philosopher who gave Christian thought a constructive, systematic and rational character. Accordingly, we shall understand why Aquinas makes his own Aristotle’s political anthropology and considers the human being as naturally a social and political animal (zoon politikon). As he says:

Since man is part of the home and the state, he must consider what is good for him by being prudent about the good of the many, for the disposition of the parts depends on the relation to the whole (Summa Theologiae, Q.47, a.10, ad.2)

The second thing is his consideration of truth and the relevance Aquinas gives it. All philosophical endeavour makes truth its quest and achievement. In fact, Aquinas wrote extensively on truth. Thus, he says: “the study of philosophy is not done to know what men thought, but rather (and where) truth stands herself” (cited in Ntibagirirwa, 1995).

2.1. Characteristics of Aquinas’ sociopolitical philosophy

First of all, Aquinas’ Political philosophy is naturalistic and cosmological. As already noted, Aquinas held that the human being is by nature a social and political being. He argues that people’s political organization is part of the government of the universe in the same way as human reason is a participation of the eternal reason in the rational creature. As for social life, Aquinas argues that it is founded on the innermost principles of person’s being and flows from human being’s very nature as related to the principles of time and space.

Secondly, Aquinas political philosophy has a metaphysical character. To understand Aquinas’ political philosophy, one needs to address himself to its relationship with the principles of being and thought, one and many, act and potency, essence and existence, as well as form and matter. The human being and political society are fitted in such a metaphysical structure. Government which is the form of the society is built on the principle of sufficient reason and the principle of finality. The sufficient reason of human government lies in the fact that the political community comes into existence because individuals converge in the common good with respect to the order of the universe. As for the principle of finality, every agent acts for an end. Hence the teleological character. The final end of government is the common good which discloses itself in happiness. The end of political activity is the common good (Farrell, 1941, pp. 365 and 370-1).

Thirdly, Aquinas social and political philosophy has an ethical character. Ethics occupies a central place in Aquinas’s political thought. In effect, it is linked with natural law and the reflection it entails. According to Leo Strauss,

Natural law is based on human nature. But human nature is political and social. What is right by nature for man will necessarily include an understanding of what is right nature for man’s political life (Strauss, 1950, p. 129).

Fourthly, Aquinas political Philosophy is historical. In his political philosophy, Aquinas makes sufficient use of historical facts. For instance, the history of the Jews plays a role in his best form of government. Furthermore, Aquinas is sensible to the historical development of political thought, its application in society and hence considers the historicity of the human being.

Fifthly, Aquinas political philosophy is Christian. As Thomas Aquinas was a Christian, we cannot but expect a political philosophy developed from a Christian perspective. In effect, his political philosophy derives from his reconciliation of faith and reason, pagan and Christian philosophy. Aquinas also derives human government from divine government and exemplifies it with a biblical account. Aquinas compares the political regime prescribed by the Mosaic law with the teachings of the Politics of Aristotle, thereby comparing the perspectives of faith and philosophy on political issues. Because it organizes political affairs in light of the divine, Aquinas concludes that the polity of the Old Testament is the answer to the question concerning the best regime (Kries, 1990). In fact, as Douglas Kries argues, for Aquinas, the judicial precepts constitute the model of political wisdom to which all human political thinkers, including Christian political thinkers, must aspire (Kries, 1990, p. 102).

Sixthly, the political philosophy of Aquinas is Aristotelian. No one denies that Aquinas makes reference to Aristotle’s Politics with a particular interest and shares quite political theses with him particularly the classification of the forms of government. However, he deviates and makes use of the fathers of the Church, other thinkers and most importantly his exceptional genius. For Copleston, Aquinas expresses Saint Augustin in Aristotelian categories. Yet, Aquinas criticizes Augustine on more than one point. It is worthy to note that he is not interested in what previous philosophers have thought rather where truth stands herself.

With this bird-eye view, let us outline key concepts of Aquinas’ political philosophy before I consider his polity.

3. The conceptual universe of Aquinas’ polity

The conceptual context of Aquinas’ political philosophy is built on four major concepts: the human being, state, authority and the law. The human being is first of all a citizen in relation to the State and citizens in relations within the State are ordered by the law which warrantees justice. As matter of fact, there is no political philosophy without these concepts. Let us consider each in turn.

3.1. The human being

First of all, Aquinas defines the human being from a biological point of view. Life comes first. It is a good impossible to preserve without mutual defense and help. The division of labour is the basis of people’s economic, intellectual life and progress. Furthermore, for Aquinas the human is that creature endowed with reason which makes him a face-to-face being. In Aristotelian terms, the human being is a social and political being. The human is more than any other being intended for sociability and political life.

According to McCool, Aquinas views the human as that being dependent on his fellow people for his ability to grow, to develop himself socially and culturally. Aquinas defines also a human being as homo homini amicus. This axiom may have been taken from Aristotle who wrote a book on friendship in his Nicomachean Ethics. For both Aristotle and Aquinas, to each form of friendship corresponds a form of government and vice-versa. A great element of man’s social nature is language which is intended for the other. It is a strong factor in the formation of the community and social order.

Aquinas claims that the individual people in the community are like individual parts in a human body. Yet each individual is characterized by his freedom, rationality and moral agency. These characteristics confer him an autonomous decision in his actions. This autonomy is connected with his ability to formulate long-term plans in his life, to consider and decide on the basis of abstracted principles what to do and what to avoid doing, and finally to conceive for himself projects considered appropriate for himself and which gives meaning to his life.

The natural and social dispositions of the human being as revealed by his natural attachment to society are developed by his reason and will out of which the State emerges.

3.2. The State

Aquinas’s State is the noblest product of human reason, a creation of human spirit which approaches perfection the more it resembles nature. The State is the perfect society, a perfectas communitas. For Aquinas, the State is part of the nature of man and the order of the State is part of the laws of nature (Summa Theologia, Ia IIae, q.90, aa.2 and3) (Summa Theologia, pp. IIaIIae, q.65, a.2.ad.2).

In his commentary on the Gospel according to Mathew, Aquinas describes the State as a more specialized form in which people by means of law and order seek a degree of temporal happiness which would be unattainable by individual effort. Aquinas argues that even in the State of innocence (Eden’s paradise), the State might have existed, in so far as the human being is naturally a social and political being by nature (Summa Theologia, Ia, q.96, a.4).

The State is an all-comprehensive and the only expression of the common good and the good life. It stands above the individual without neglecting his freedom (Gierke, 1958, p. 94).

The State is achieved through an evolutional process. The first stage is a social union in marriage which gives birth to a domestic society. Several families under an authority form a community which excels in the extent of production, mutual assistance and autonomy. The State arises from plurality of communities and is the frame of the perfect, economic, spiritual and moral life of a people. The State is the goal and end of all the preceding communities.

Corollarily, the good of the State is the noblest of all human good (De Regimine Principum, 1938, Book 1, Ch.1). From another angle, one may say that the State originates from three complementary causes: Individual motives insofar as isolation for the human being means limitation; Human instinct and reason which enable the human being to articulate his interests with those of his fellow people; Human paternal instinct which gives rise to the family which is the first unit of society and from which originates a sense of responsibility and power (Commentary on the Politics of Aristotle, 1951, Book 1, Lect.2).

Aquinas claims also that the root of the State is the natural law. All things necessay to carry out duties of the State such as making laws, juridical sentences, punishment of law violation are part of the natural law. The State is morally an independent subject of right and duty. It has a moral and juridical personality (Summa Theologia, Ia IIae, q.97, a.3; see also Maritain, 1951, pp.12-13). For this to be achieved there must be an authority.

3.3. Authority

In De Regimine Principum, Aquinas defines authority in the following terms:

If therefore, it is natural for man to live in the society of many, it is necessary that there exist, among men, some means by which the group may be governed. For where there are many men together and each is looking after his interest, the group would be broken up and scattered unless there were some to take care of what appertains to the commonwealth (De Regimine Principum, 1938, Book I, Ch.1).

According to this definition, the condition for authority to avail is society. Aquinas compares society to a human body. Since each individual is concerned with his private interest, it is necessary that there be someone, the head of the body, to converge all the private interests in the commonwealth. The authority is conceived as a means by which the society is governed. By this token, Yves Simon would say: “in its collective action, authority is the everlasting principle of social unity in the pursuit of the common good” (Simon, 1940, pp. 20-30).

Authority lies in human nature. The human being is by nature a member of a society as ordained to issue the common good of all. Society brings in authority in the person of the one who has care of the community. Instead, the natural needs for the society bring people in a relation of submission to authority (Foley, 1956, p. 4).

For Aquinas, authority comes from God and is given by God to all the people as a whole. He argues that the whole people act as one, few or many and since the whole people are the principal cause of authority, all people ought to have a share in the government whichever it may be.

There are two theories in the origin of authority (McCoy, 1953). The first is the Transmission theory: all people are the immediate cause of authority though the primary cause remains God. Here we are brought in direct democracy characteristic of the natural law. The second one is Designation theory: God is the immediate cause of political authority. If so, the people act as instrumental cause. In both theories, Aquinas argues that God is the ultimate source of authority while people are a secondary source. Since authority comes from God, it must be exercised as part of the general scheme by which the universe is governed in as much as the relation among people proceeds from natural law, authority should be obeyed by reason of conscience of free people.

The last concept to consider in Aquinas’ political philosophy is the law.

3.4. The law

According to Aquinas, the law is “an ordinance of reason for the common good, made by him who has care of the community and promulgated (Summa Theologia, Ia IIae, q.90, a.4). There are four aspects in this definition:

i. The law is a work and a function of reason (Summa Theologia, Ia IIae, q.90, a.1): This shows that we are in a perfect society which is itself a product of reason, the State;

ii. The common good: Law denotes something bearing upon the general good. It regards the order aimed at in the attainment of happiness (Summa Theologia, pp. Ia IIae, q.90, a.2);

iii. Authority: The source of the law is authority which may be either the people or the person who has the care of the community (Summa Theologia, pp. Ia IIae, q.90, a.3).

iv. Promulgation: The law has a binding force only when it is publicly announced.

So far we have discussed the characteristics and the conceptual universe in which we can locate Aquinas’ best form of government. In the next section, we shall deal with the best form of government central to this paper.

4. Polity or the best form of government.

No one would dispute the truism that the best State should be led by the best government. Political thinkers of all times have discussed the issue of the best form of government. Why best government? In the history of political philosophy, there has been a tendency to divide forms of government according to two criteria. The criterion of “who rules” and the criterion of “how the rule is conducted”. The following table gives us various forms of government:

Who rules

Just

Unjust

One

Monarchy/Monocracy

Tyranny

Few

Aristocracy

Oligarchy

Many

Democracy (constitutional government)

Ochlocracy or Mob rule

As it can be seen in the above taken, the criterion of a good government is justice. A government by one (monarchy), few (aristocracy) or many (democracy) can be good provided that they do not fail in justice. When Aquinas talks of just form of government as monarchy, aristocracy or democracy, he understands a government in which the good of the people is held in esteem so much that equity and fairness prevail. Governing by justice leads to the common good (De Regimine Principum, 1938, pp. Book 1, ch.1and 3). When they fail to be just, they degenerate into unjust form of government, namely tyranny, oligarchy, or mob rule respectively.

We shall not discuss all just forms of government! Neither shall we concern ourselves with unjust ones. We shall concentrate on the best form of government.

Where does Thomas Aquinas fetch this issue of the best form of government? The issue of the best form of government is very much present in Aristotle discussion on Politics. Plato himself reverted back to it in his old age book, The laws. However, there is yet another reason why Aquinas concerned himself with the issue of the best form of government. According to Otto Gierke, in the Middle Ages, there was a tendency to coordinate the ruler and the community and ascribe the supreme power to both of them in union (Gierke, 1958, p. 45). This principle of “divided sovereignty” led Aquinas to reject pure Monarchy, which he so much defended in De Regimine Principum. He valued the limited rulership which is a mixture of the three just forms of government. He sees the best form of government in a State wherein one is given power to preside over all, while under him other citizens have a governing power. Yet a government of this kind is shared by all because all are eligible and because the rulers are chosen by all (Summa Theologia, Ia Iae, q.105. a. 1). Aquinas concludes that this is the best form of government being partly kingdom since there is one head for all, partly aristocracy because a number of citizens are set in authority, and partly democracy, government of the people because rulers are chosen from the people by the people.

Aquinas’ best form of government calls for collaboration of all social forces for the common good. It is a form of government qualified of being a bene commixta, properly proportioned, or a “régime bien dosé”. There are six factors that prompted Aquinas to opt for the mixed régime rather than monarchy as he has defended it in De Regimine Principum. We shall outline them below:

i. Dominican government

The best régime for Aquinas is furnished by the constitutions of the Order of Preachers, the Dominicans. The Dominican priory is like a polity in which the electorate not only chooses its high rulers but also periodically call them to account through chapters. In provincial and general chapters, a special note is given to definitors elected for this purpose. Aquinas belonged to this Dominican mixed constitution in which the friars (the people) elect their Master General (constitutional monarch) through their representatives (parliament). This method of election is also adopted in the election of the Prior Provincial.

ii. Authorities:

Aquinas’ mixed government is not a new idea. Plato abandoned the Republic while offering a practical political framework with popular respect as his book The Laws argues. He teaches that authority and liberty, tenors of monarchy and democracy should be preserved because neither can subsist without the other. Aristotle devoted sufficient space for a mixed government in his Politics.

iii. Prevailing systems.

Aquinas’ political mixture cannot be divorced from the spirit of his age. He stood at the crossing in the development of European thought. It was an age of universities which were developing, challenging the old traditions with democratic minds. While some traditional thinkers kept themselves in the medieval theocracy, the State was recovering its rights of existence. People were recovering their political rights at least from a theoretical point of view.

iv. Theological consideration

Aquinas’ Christian background influenced him largely for the choice of the best form of government. The primary source from which he draws was the political history of the chosen people whose government was established by the divine law. Aquinas argued that Moses and his successors governed the Jewish people in such a way that each of them was a ruler over all. Under him, seventy-two elders and virtuous men were chosen. Finally, the rulers were chosen from the people by the people

v. Cosmological consideration

This consideration flows from the Aristotelian idea that since the human’s political relationships are grounded in nature, the real fount of the relations between people must be sought in their different abilities and in their natural inequalities. All people do not have the same intellectual perspicacity, strength of will, inclination to virtue and practical abilities such as the ability to govern (see Summa Theologia, Ia, q.96, a.4).

vi. Metaphysical consideration

Aquinas’ whole political government is dependent upon metaphysics. The best form of government itself is based on the principle of unity, universal finality and the goodness of being. The best government is a unity in diversity whose aim is to involve all citizens for their common good.

Before we conclude, let see the principles that guide the best form of government.

5. Principles of the best form of government

There are eight principles that guide the best form of government which Aquinas proposes:

The first principle is Reason: The best form of government is known as enlightened government that is a regime in which reason dominates in those who govern. The State itself is a product of human reason so that political organization requires a rational nature. For Aquinas there are three orders found in the human being: the rule of reason, the rule of the divine, and the rule regulating man as a political and social animal (Summa Theologia, Ia IIae, q.72, a.4)

The second principle is Virtue: For Aquinas, the best government requires the virtuous rulers since the ultimate end of the State is the life of virtue. The leaders of the best regime must provide the virtuous living by introducing, preserving and perfecting a good order of life. This order consists of peace, harmony among the citizens coupled with the necessary economic background.

The third principle is Justice: Peace and unity require the observance of justice. The best form of government is characterized by a just exercise and distribution of the political power for the common good, as well as a just distribution of political status, which is citizenship and equality.

The fourth principle is Law: We cannot talk of justice without wise laws. In the best form of government, the rule of law must prevail more than in the particular form. Thus we may understand why Aquinas studies the best form of government as part of his treatise of law (Summa Theologia, Ia IIae, qq.90-108).

The fifth principle is the Universal suffrage: This political principle is the characteristic of the best form of government. It consists of elective system giving the means of choosing the most worthy officials by whom the State is governed. For Aquinas, election of leaders of the State is a right of the people.

The sixth principle is Sovereignty: For Aquinas, sovereignty belongs both to the people and the ruler. While recognizing the rulers’ role as a political institution, the people still must participate actively in the life of the State. This is what is referred to as the principle of divided sovereignty (Gierke, 1958, p. 44).

The seventh principle is the Structure: The best form of government has a threefold structure. First comes the head of the State or monarch elected for his virtue and his political capacity. Under him, is a body of best men elected for their virtue. Finally come the people from whom and by whom the magistrates are elected. The absence of one of this structure disqualifies the best regime from being what it is!

The eighth and last principle is the transcendental aspects: The best form of government combines all the just forms of government and hence satisfies unity in diversity and insufficiencies of each one. Monarchy does not allow the participation of everyone, aristocracy lacks unity of action while democracy lacks both unity of action and higher virtue although it enables many to participate in government (Schall, 1978, p. 106). Furthermore, while the particular forms of government can be corrupted, the best form of government is beyond corruption. By maximizing justice and virtue, the best regime enables all the citizens to achieve their highest ends in actual political practice (Schall, 1978, p. 104).

Conclusion

From what has been developed so far, it is obvious that the sociopolitical philosophy of Thomas Aquinas is very rich: rich in its characteristics, rich in its conceptual universe and rich in the relevant question it poses, namely that of the best form of government. This is very question of how best we should be governed and which leadership could respond better to this quest. This is a perennial question which even today’s political thinkers keep wrestling with. Today, we may claim that democracy is the best form of government, as democracy is being universalized. Yet we must still ask ourselves: which democracy is the best form of government? Is it your question? What is your answer?

Références

Aquinas, T. (1938). De Regimine Principum (On the governance of rulers). (G. B. Phelan, Trad.) New York: Sheed.

Aquinas, T. (1941). Summa Theologia . New York: Benzinger brothers.

Aquinas, T. (1951). Commentary on the Politics of Aristotle. (R. Spiazzi, Éd.) Rome: Marietti.

Farrell, W. (1941). A companion to the Summa (Vol. 1). New York: Sheed and Ward.

Foley, A. M. (1956). Authority and personality development according to Saint Thomas Aquinas . Washington, DC: The Catholic University of America Press.

Gierke, O. (1958). Political theories of the Middle Ages. (F. Maitland, Trad.) Cambridge: Cambridge University Press.

Kries, D. (1990). Thomas Aquinas and the politics of Moses. Review of Politics, 52, 84-104.

Maritain, J. (1951). Man and the State. Chicago: University of Chicago Press.

McCoy, C. (1953). Note on the problem of the origin of political authority. The Thomist, 16(1), pp. 71-81.

Ntibagirirwa, S. (1995). Government in Thomas Aquinas'socio-political philosophy: a critical study. Ibadan: University of Ibadan.

Schall, J. (1978). The best form of government: A perspective on the continuity of political theory. Review of Politics, 40(1).

Simon, Y. (1940). Nature and function of authority. Milwaukee: Marquette Univerty Press.

Strauss, L. (1950). Natural right and history1950. Chicago: University of Chicago Press.

L’anthropologie thomiste face à l’idéologie du genre

Par Abbé Melchior MUBANO

De nos jours le terme « genre » [ou gender en anglais] est le plus galvaudé et le plus manipulé à cause de plusieurs théories qui sont développées à ce sujet et avancées le plus souvent sans fondements fermes du point de vue scientifique, véhiculant ainsi une vision anthropologique erronée capable de semer la confusion par une désorientation culturelle de notre temps.

En effet, il est hors de doute que la nôtre est l’époque la plus marquée par les sciences les plus spécialisées qui s’occupent de l’être humain. L’époque contemporaine est la seule à enregistrer la floraison d’une grande variété d’études qui essaient d’apporter d’une façon efficace et fascinante des solutions à certaines questions soulevées par le mystère et l’énigme qui enveloppent l’être de cet animal raisonnable. Cependant, incapables de répondre d’une façon exhaustive à la question humaine suite aux limites méthodologiques, certains scientifiques et penseurs ont proposé des théories basées sur l’interprétation mythique et les fausses croyances qui se sont avérées beaucoup plus idéologiques que scientifiques.

Étant donné que l’être humain est multidimensionnel et qu’une seule science ne suffit pas pour épuiser la complexité de sa réalité, son étude nécessite une variété de disciplines scientifiques qui se complètent mutuellement. Pour que cette interdisciplinarité soit efficace, elle doit être ordonnée et bien orientée. Une telle tâche incombe à la mère des sciences qu’est la philosophie qui s’occupe des causes ultimes du « tout » dont les sciences particulières décrivent les différents secteurs. Elle est la seule mieux habilitée à donner une réponse complète ou une solution exhaustive à la question « Qu’est-ce que l’être humain en tant que tel ?» contrairement aux sciences humaines singulières qui ne sont capables que de donner des connaissances partielles et superficielles sur l’être humain parce qu’elles se limitent à décrire et à classifier ses différents comportements déterminés.

C’est dans ce cadre que cet article se veut un regard philosophique sur les différentes théories actuellement en vogue sur l’une des plus importantes dimensions de l’être humain qu’est la sexualité dans le but d’en discerner de graves erreurs et d’en proposer des solutions pour une vision anthropologique correcte et équilibrée. Pour une saine éducation sexuelle, le monde actuel a besoin des connaissances scientifiques basées sur la réalité et une interprétation correcte de la nature humaine plutôt que des idéologies basées sur de fausses croyances visant le renversement de la réalité et la dénaturation de l’être humain.

Sexualité : du sexe au genre

Comme ci-haut signalé, les sciences humaines très développées surtout au cours du siècle dernier n’ont pas laissé sous l’ombre sa dimension sexuelle. Et ces études ne se sont pas seulement limitées sur le sexe en tant qu’organe biologique avec ses vertus reproductrices mais aussi et surtout sur le genre en tant que bipolarité sexuelle telle que culturellement interprétée et assumée au niveau de la société. La Congrégation pour l’éducation catholique (CEC) l’explique en ces termes :

En effet, l’avènement du XXe siècle -avec ses visions anthropologiques- a été porteur des premières conceptions du genre, fondées d’un côté sur une lecture purement sociologique des différenciations sexuelles et d’un autre sur une accentuation des libertés individuelles. Le milieu du siècle voit naître en effet une série d’études qui ont accentué fortement l’importance du conditionnement extérieur et de son influence sur les déterminations personnelles. Appliquées à la sexualité, ces études ont voulu démontrer que l’identité sexuelle ressortait plus d’une construction sociale que d’un donné naturel ou biologique.

C’est cette déconnexion entre le donné biologique et son interprétation socioculturelle qui a donné lieu à certaines déviations aussi bien au niveau de l’interprétation qu’au niveau du comportement adopté car il est difficile voire impossible de comprendre la vérité d’un phénomène et d’en faire une interprétation correcte s’il est délié de son fondement. C’est ce qu’Aristote veut signifier dans le livre α (Alpha ellaton) de sa Métaphysique, en soutenant que l’« On ne peut pas savoir la vérité si on ne connaît pas la cause ». Certes de telles déviations ne vont pas sans de graves erreurs dans la conception de la personne humaine ce qui, par conséquent, aboutit à une anthropologie contraire à la juste raison.

De l’idéologie du genre

Il n’est pas facile de ramasser en une seule définition toutes les versions de la théorie du genre dans toutes leurs divergences et déviations, et joindre en un seul bout les extrêmes de modération et radicalité entre lesquelles oscillent plusieurs variantes de cette idéologie. Néanmoins, nous essayerons de donner les caractéristiques fondamentales des plus importantes variantes pour faciliter à comprendre en quoi consiste ladite idéologie en général.

L’idéologie du genre pourrait être comprise comme un ensemble plus ou moins cohérent d’idées présentées sous diverses versions dont la caractéristique commune est la négation de la différence et de la réciprocité naturelle entre un homme et une femme. Les différences entre l’homme et la femme sont prises pour de simples effets d’un conditionnement historico-culturel et doivent être effacées pour éviter les inégalités sociales pouvant s’établir entre les deux sexes.

L’idéologie du genre prône donc une société sans différence de sexe voulant ainsi imposer la neutralité sexuelle de la personne et de la vie. C’est une idéologie dangereuse tant pour la famille que pour la société étant donné qu’elle « induit des projets éducatifs et des orientations législatives qui encouragent une identité personnelle et une intimité affective radicalement coupées de la diversité biologique entre masculin et féminin. L’identité humaine est laissée à une option individualiste, qui peut même évoluer dans le temps ».

Comme on le voit très bien les théories du genre n’affectent pas seulement la famille en tant qu’institution traditionnelle et, par ricochet, la société en général, dont la famille est la cellule de base, mais aussi elles affectent la personne humaine en tant qu’individu. Le document de la CEC l’exprime en ces termes :

Au début des années quatre-vingt-dix du siècle dernier, elles se sont concentrées sur les possibilités pour les individus de déterminer eux-mêmes leurs orientations sexuelles sans tenir compte de la réciprocité ni de la complémentarité de la relation homme-femme ainsi que de la finalité procréative de la sexualité. On arrive même à théoriser une séparation radicale entre genre (gender) et sexe (sex), en donnant la priorité au premier sur le second.

Certes ce n’est pas la distinction entre le sexe et le genre qui fait problème mais la mauvaise interprétation qui confond cette distinction avec une séparation radicale. Cette confusion ouvre la porte à la multiplicité de nouvelles orientations sexuelles variées pouvant être subjectivement définies et prises par l’individu indépendamment de la différence sexuelle entre homme et femme. En outre la conception du genre est laissée au choix personnel de l’individu pouvant le définir indépendamment de sa sexualité biologique et faisant fi des valeurs humaines véhiculées par sa culture.

Ainsi, on assiste à une opposition progressive entre la nature et la culture qui conduit au passage du genre au transgenre. D’où différentes formes actuellement siglées par LGBTQIA+. Un sigle qui recouvre les termes suivants : Lesbienne, Gay, Bisexuel(le), Transsexuel(le), Queer et Intersexe et Assexuel(le) ou Aromantiques. Le signe d’addition (+) englobe toutes les autres orientations sexuelles, dont il est difficile de connaître exactement le nombre et les noms, qui ne s’identifient à aucune autre identité dans l’acronyme.

Toutes ces différentes versions par lesquelles le genre est actuellement conçu semblent avoir le mouvement pour principe et suivre la formule patha rhei d’Héraclite. Elles sont toutes caractérisées par « une dimension fluide, flexible et nomade qui soutient l’émancipation complète de l’individu de toute définition sexuelle donnée a priori entrainant la disparition de classifications considérées comme rigides ».

Quelques erreurs anthropologiques ?

- Dénaturation de l’être humain : Si on pose un regard critique sur les différentes variantes de l’idéologie du genre en les analysant attentivement, on note qu’elles surgissent d’une compréhension erronée de la personne humaine en général mais surtout de la négation de sa nature en tant qu’être humain. En effet, le libertinage par lequel le concept du genre est manipulé et la fluidité par laquelle diverses orientations sexuelles sont subjectivement définies « indiquent un processus progressif de dénaturation et d’éloignement de la nature vers une option totale pour la décision du sujet émotif ». L’être humain est pris pour un être sans essence prédéfinie et la « création » de cette dernière est reléguée à la liberté capricieuse du sentir et du vouloir individuel.

- Dualisme anthropologique : L’une des plus graves erreurs de l’idéologie du genre n’est pas que la séparation radicale qu’elle établit entre le sexe et le genre mais surtout la supériorité qu’elle accorde au genre par rapport au sexe. Cette supériorité non fondée sur la vérité de l’être réduit le corps à une matière inerte qu’une volonté individuelle rendue absolue peut manipuler comme bon lui semble. « Ce physicisme et ce volontarisme donnent lieu au relativisme, où tout est équivalent et indifférencié, sans ordre et sans finalité ».

- Relativisme éthique : l‘idéologie du genre véhicule une grave erreur d’absolutiser l’individu en le déconnectant de l’Être suprême qui est sa Cause première et en lui donnant une liberté illimitée qui se permet de tout et une volonté capricieuse qui juge arbitrairement comme si en dehors de l’individu il n’y a ni vérité ni valeur ni principe universel pour guider son action et son comportement sinon ses seuls sentiments changeant selon les circonstances. Une telle conception individualiste ferme l’être humain à la transcendance et le confine dans l’horizontalisme qui appauvrit sa relation tridimensionnelle la réduisant de la tripolarité (homme-femme-Dieu) à la bipolarité (homme-femme).

- Dimorphisme sexuel nié : Contre les résultats affirmatifs des recherches scientifiques dont la génétique, l’endocrinologie et la neurologie, l’idéologie du genre dans ses diverses variantes rejette la différence sexuelle et la réciprocité naturelle entre un homme et une femme. Elle prône la neutralité en promouvant le choix arbitraire de l’identité personnelle. « Mais l’utopie du “neutre” ôte à la fois la dignité humaine de la constitution sexuellement différente et la qualité personnelle de la transmission générative de la vie ».

- Contradiction dans la formation de l’identité personnelle : Par le souci de vouloir tout uniformiser, l’idéologie du genre sape l’altérité en détruisant la différence qui en est le fondement. En effet, la différence est la condition de la connaissance de l’identité qui ne peut que se fonder sur l’altérité. Autrement dit, c’est la différence du « tu » comme l’autre pôle de la relation avec autrui qui permet la reconnaissance de l’essence du « je ». Ainsi la formation de l’identité personnelle n’est possible que par la différence de l’autre. Il est donc contradictoire vouloir former une identité personnelle en écartant l’altérité qui en est la conditio sine qua non. Subséquemment :

La tentative de dépasser la différence constitutive homme-femme, comme il advient dans l’intersexualité ou le transgenre, conduit à une ambigüité masculine et féminine, qui présuppose de manière contradictoire la différence sexuelle que l’on entend nier ou dépasser. […] Une telle conception cherche à anéantir la nature (tout ce que nous avons reçu comme fondement préalable de notre être et de notre agir dans le monde), tandis qu’elle la réaffirme implicitement.

Qu’en dit l’anthropologie thomiste ?

Si les théories proposées autour du genre sont reconnues idéologiques, c’est surtout parce qu’au lieu de se baser sur la vérité de l’être et respecter l’ordre naturel de la réalité humaine qui fonde la culture sur la nature, elles renversent la réalité et se basent sur un désordre qui oppose la culture à la nature. Ainsi, le genre, phénomène social, défini comme manière culturelle de vivre la différence sexuelle, devient opposé au sexe, son fondement naturel, défini comme appartenance à une de deux catégories biologiques dérivant de la dyade originaire, homme et femme.

En d’autres termes, l’idéologie du genre s’attaque à la totalité ontologique de l’être humain et la dissèque en opposant son individualité à sa personnalité. Elle s’en prend ainsi à la racine métaphysique de la différence sexuelle : homme et femme, deux modalités selon lesquelles la réalité ontologique de la personne humaine s’exprime et se réalise. Que veut dire alors l’anthropologie thomiste en soutenant que l’homme n’est pas qu’individu mais aussi personne ?

En interprétant la définition que Thomas d’Aquin donne à l’être humain : « subsistens rationale vel intellectuale », un de ses disciples Battista MONDIN explique que grâce à sa subsistance dans l’ordre de l’esprit, l’homme est en même temps un être fermé en soi-même, en tant qu’il est subsistant ; et extrêmement ouvert et excentrique, en tant il est esprit. C’est pour cette raison qu’il jouit d’une ouverture infinie et peut entrer en communication avec les autres êtres spirituels.

En effet, le Docteur Angélique regarde la personne du point de vue ontologique et par conséquent la considère comme une modalité de l’être, id est, de cette perfection-là que, dans sa métaphysique, est la perfectio omnium perfectionum, la nobilitas omnium nobilitatum et l’actualitas omnium actuum ; et c’est justement par rapport à cette perfection que la personne occupe le degré le plus haut. Effectivement, c’est dans la personne que l’être trouve son actualisation la plus pleine, la plus excellente et la plus complète. Pour ce motif, tous les êtres à qui revient le titre de personne sont des êtres qui jouissent d’une dignité infinie, d’une valeur absolue, soit qu’il s’agisse de Dieu, des anges ou de l’être humain.

Certes, le concept de personne comme celui de l’individu, est un concept analogique : il ne se prédique pas univoquement de Dieu, des anges et de l’être humain mais selon un ordre de priorité et de postériorité (secundum prius et posterius). Toutefois, il désigne toujours la même perfection fondamentale : le subsistant individuel dans l’ordre de l’esprit, comme le précise clairement Thomas d’Aquin : « omne subsistens in natura rationali vel intellectuali est persona ». Cette formule est la définition boécienne de la personne : « rationalis naturae individua substantia » que l’Aquinate simplifie tout en renforçant ses caractères essentiels exprimés par les quatre termes qu’il juge indispensables pour un concept de « personne » adéquat : rationalis, natura, individua et substantia.

Le Docteur Angélique souligne que dans cette définition, le terme substantia est à comprendre dans le sens de la substance première (sujet singulier) et non dans celui de la substance seconde (essence universelle) car la personne est toujours un subsistant singulier. Quant au terme individuo pouvant se prédiquer aussi bien de la substance que de l’accident, l’Aquinate souligne que l’individu se prédique spécialement de la substance car celle-ci s’individualise elle-même tandis que l’accident est individualisé par son sujet qui est une substance. Ainsi, en préférence des autres, les individus substantiels, ont un nom propre - persona - et se disent hypostases ou substances premières.

Le Docteur Angélique note aussi que Boèce a bien fait d’utiliser natura au lieu d’essence car c’est le terme natura qui, dans le sens boécien, désigne la différence spécifique constitutive de chacun. C’est cette différence qui complète la définition et se déduit de la forme propre de la chose. Enfin, concernant le terme rationalis, Thomas dit qu’il convient parfaitement à la définition de personne appliquée à l’être humain car c’est justement grâce à la rationalité que l’être humain entre dans l’ordre de l’esprit auquel appartiennent les personnes. Cependant pour étendre cette définition aux autres personnes (Dieu et les anges) que l’être humain, il faut encore y ajouter le terme intellectualis pour souligner les deux aspects essentiels et indispensables de la personne : l’aspect ontologique (subsistens) et l’aspect psychologique (rationalis ou intellectualis).

Ces deux aspects de la personne - subsistance et nature spirituelle - sont strictement liés entre eux. En effet, puisque la forme substantielle de l’être humain (l’âme) possède l’être par soi et non par son union avec la matière (le corps), cette forme est spirituelle ; et puisque l’âme humaine possède par soi l’acte d’être [actus essendi], elle peut opérer per se, c’est-à-dire contrôler ses actions et agir librement. Et la subsistance est cette liberté dans l’agir qui caractérise essentiellement la personne. Et l’on comprend pourquoi, d’une façon spéciale et parfaite, la subsistance dans sa forme particulière et individuelle, se trouve dans les substances rationnelles qui ne sont pas des sujets passifs comme les autres substances mais agissent par elles-mêmes. Ainsi dans l’être humain, comme totalité de l’être singulier, la personne embrasse la matière (le corps), la forme substantielle (l’âme), les formes accidentelles et l’acte d’être.

In fine, disons que Thomas d’Aquin distingue clairement le concept d’individu et celui de personne mais le fait d’une façon logique et non réelle. Il ne les prend pas pour deux réalités séparées et distinctes mais pour une seule et même réalité dont l’individualité et la personnalité sont les dimensions indispensables et complémentaires. La différence réside dans le fait que le concept de « personne » a une compréhension plus large et il est plus riche que celui d’individu, car il inclut aussi l’intelligence, la volonté, la liberté, l’autoconscience, toutes les perfections enracinées dans la raison et qui ne sont pas comprises dans le concept d’« individu » ayant une valence sémantique plus générique et indéterminée.

Où faut-il alors placer la sexualité ?

Vu la relativisation profonde dont la différence sexuelle est l’objet et la fluidité incessante à laquelle est sujet le genre, il n’est pas superflu se demander si la différence sexuelle est une option manipulable ou si la sexualité n’a qu’une fonction purement corporelle sans aucun lien avec la forme substantielle de l’être humain. Sur ce point, nous nous tournons vers un autre thomiste de renom Jacques MARITAIN, un philosophe chrétien qui, non seulement, s’est intéressé particulièrement à la question anthropologique d’égalité et de diversité entre l’homme et la femme, mais aussi, il a renouvelé l’anthropologie aristotélico-thomiste en en montrant les points faibles et même dépassés.

Concernant la position de Maritain sur la question de l’identité sexuelle et son fondement, L. J. FOŠUM note que le philosophe français renouvelle la vision traditionnelle de la nature humaine en enracinant la différence sexuelle dans l’âme humaine. Il fonde son anthropologie philosophique sur l’individuation de l’âme humaine en ordre à la matière et à un corps. C’est donc l’âme qui est le principe à partir duquel le corps se forme et non l’inverse. Ainsi les propriétés subspécifiques de l’homme et de la femme sont d’abord ancrées dans l’âme avant d’être exprimées dans le corps. L’identité masculine et féminine est plus ancrée dans l’âme que dans le corps.

En effet, parlant de la particularité de la signification ontologique de la différence sexuelle chez l’être humain par rapport aux animaux, Maritain s’exprime ainsi :

[…], il faut dire que chez nous la fonction sexuelle, […], n’est qu’une des propriétés d’une typicité subspécifique d’ordre essentiel qui, dérivant de l’âme spirituelle, embrasse toute la nature, spirituelle et corporelle, de la personne humaine masculine ou féminine. La typicité masculine ou féminine n’est pas une simple typicité fonctionnelle ou génitale, c’est une typicité subspécifique de nature (de nature individuelle) ordonnée au progrès temporel et spirituel de l’espèce humaine vers sa fin, et impliquant une différenciation dans les qualités de l’âme, et qui comprend comme une de ses propriétés, mais seulement comme une de ses propriétés, si nécessaire qu’elle soit, la fonction génitale qui concerne l’animalité humaine.

En disant « type subspécifique » chez l’être humain, Maritain entend une propriété de l’essence même de la personne considérée qu’elle soit homme ou femme. Il préfère même dire « type subspécifique d’ordre modal-essentiel » pour souligner que cette propriété est un mode de l’essence humaine elle-même. Evidemment tous ces termes sont choisis dans le but de clarifier la différence avec le type subspécifique animal qui n’est que d’ordre purement fonctionnel.

Affirmant que l’âme humaine « est masculine ou féminine en vertu de la forme typique de son être même », Maritain soutient que cette individualité essentielle ne se perd pas avec la mort mais qu’elle est gardée même dans l’univers des ressuscités malgré l’absence de mariage et de génération. Certes, dans la vie glorieuse, les caractères différentiels entre l’homme et la femme ne seront plus conditionnés par le corps mais seulement par l’âme et ainsi la plénitude ontologique de l’être humain restera toujours garantie par la complémentarité spirituelle entre la dyade originaire homme-femme.

Que peut-on retenir ?

S’il nous est permis de conclure cette réflexion, il importe de rappeler que la sexualité ne peut pas être désintégrée de la personne humaine comme le voudrait l’idéologie du genre. Elle ne se vit mieux qu’à la lumière d’une anthropologie rationnellement correcte qui respecte la vérité de la nature humaine dans la complexité de sa réalité. En effet, l’être humain comme toute autre entité naturelle possède une essence, prédéfinie par le Créateur, comme un principe originaire et immanent qui le caractérise dans son être en tant que tel. Cette essence dont la masculinité et la féminité sont les deux modes essentiels et complémentaires, est unique et la même chez tous les humains, ce qui donne l’unicité de nature, l’égalité en nature et en dignité à la dyade homme-femme dont la dualité sexuelle constitue la plénitude ontologique de l’être humain.

Ainsi la différence sexuelle, bien que liée aux fonctions temporelles du corps, est profondément inscrite dans l’âme spirituelle et a des implications pour la personne humaine dans la totalité de son unité psychosomatique. C’est ce qui fait que l’espèce humaine soit constituée en deux types subspécifiques qui correspondent à des différences ontologiques. Les propriétés masculines ou féminines sont donc beaucoup plus fondées dans l’âme que dans le corps et leur persistance après la mort est garantie par l’immortalité de l’âme qui en est le principe, car un corps est masculin ou féminin parce qu’il est formé à partir d’une âme masculine ou féminine.

Enfin s’il en est ainsi, il va de soi que vouloir changer son identité sexuelle c’est, non seulement, s’opposer au Créateur en se dénaturant soi-même mais aussi s’ériger soi-même en démiurge manipulateur qui ne peut que commander la destruction lente et sûre de la personne humaine, de la famille et de la société. Nous saluons les diverses recherches menées par les sciences humaines à différencier avec l’idéologie du genre. Celle-ci s’éloignant de la vérité et inversant l’ordre naturel de la réalité n’a servi qu’à la désorientation et la confusion. En revanche celles-là ont permis à l’humanité de progresser et de se développer montrant bien l’égalité, l’harmonie et la complémentarité entre l’homme et la femme. Elles sont à encourager pour purifier et éclairer le contexte socioculturel contemporain.

Chronique du Séminaire : Second Semestre 2023-2024

Par Fratris Alphonse NIYOYIRORERA et Joseph BUHENDWA.

Aimables lectrices et lecteurs de la revue Aréopage, nous vous présentons en ces pages quelques évènements importants qui ont marqué la vie au Grand séminaire Saint-Thomas d’Aquin Philosophicum de Kabgayi au cours du second semestre de l’année académique 2023-2024.

- Lundi, le 26 février 2024 : Début des cours du deuxième semestre.

- Du Samedi, le 2 mars au Dimanche, le 3 Mars 2024 : Week-end de Récollection mensuelle qui avait pour thème « Venez à ma suite, et je vous ferai les pêcheurs d’hommes » (Mt 4,19). Le prédicateur était l’Abbé Michel NSENGUMUREMYI, prêtre du diocèse de Ruhengeri, et qui fait son apostolat au Grand Séminaire Theologicum de Nyakibanda comme Père spirituel.

- Dimanche le 3 mars 2024 : Le troisième dimanche de carême. La Messe fut présidée par l’Abbé prédicateur Michel NSENGUMUREMYI en clôturant la récollection mensuelle.

- Dimanche le 10 mars 2024 : Le quatrième dimanche de carême. La messe a été présidée par l’Abbé Pascal NIZEYIMANA. Ce jour-là, il y a eu aussi sur nos terrains, les matches amicaux avec le Grand séminaire de Nyakibanda

- Dimanche, le 17 mars 2024 : Le cinquième dimanche de carême. Nous avons eu la messe dominicale à la Basilique Mineur de KABGAYI, et elle a été célébrée par l’Abbé Télesphore NYANDWI TORINGABO.

- Mardi le 19 mars 2024 : Solennité de Saint Joseph, époux de Marie. La messe a été célébrée par l’Abbé Télesphore NYANDWI TORINGABO.

- Mercredi le 20 mars 2024 : Commencement officiel du jubilée de 2025 ans de notre rédemption et 125 ans de l’évangélisation du Rwanda. Dans notre Séminaire l’évènement a été marqué par des matches amicaux des bâtiments et la conférence sur ce jubilée avec l’Abbé Celse HAKUZIYAREMYE

- Dimanche le 24 mars 2024 : Dimanche des Rameaux et de la Passion de Jésus. La Messe a été présidée par l’Abbé Recteur, Claudien MUTUYIMANA, entouré de tous les prêtres formateurs.

- Mercredi le 27 mars 2024 : Messe Chrismal à la Basilique Mineure de Kabgayi, présidée par S.E Monseigneur Balthazar NTIVUGURUZWA, Évêque de Kabgayi.

- Jeudi le 28 mars 2024 : Jeudi Saint. Pour préparer le triduum Pascal, nous avons eu une instruction animée par l’Abbé Pascal NIZEYIMANA, père spirituel. Le thème fut « qu’est-ce que de savoir sur le Triduum Pascal ». Dans l’après-midi à 16h00, toute la communauté de Grand Séminaire s’est rendue à la Basilique de Kabgayi pour participer à la Missa in Caena Domini qui a été présidée par Son Excellence Monseigneur Balthazar NTIVUGURUZWA, Évêque de Kabgayi.

- Vendredi le 29 mars 2024 : Vendredi Saint. Avec les fidèles de la paroisse de Kabgayi, à partir de 8h30, il y a eu la Via Crucis qui part de la cathédrale à Fatima. Elle a été dirigée par le curé de la paroisse cathédrale, Abbé Celse HAKUZIYAREMYE. A 15h00, il y eut la célébration de la Passion du Seigneur à la Basilique de Kabgayi.

- Samedi le 30 mars 2024 : A 17h00 notre communauté s’est rendue à la Basilique Mineure de Kabgayi pour la Veillée pascale.

- Dimanche le 31 mars 2024 : Dimanche de la Pâques du Seigneur. A 11h00 nous avons eu la messe solennelle à la cathédrale présidée par Son Excellence Monseigneur Evêque du Diocèse de Kabgayi.

- Lundi le 1 avril 2024 : La fin du deuxième trimestre de l’année académique 2023-2024 et départ pour les vacances de Pâques.

- Lundi le 15 avril 2024 : Rentrée des vacances de Pâques et début du troisième trimestre.

- Dimanche le 21 avril 2024 : Quatrième dimanche de Pâques et solennité du Bon Pasteur. La messe a eu lieu à la Basilique mineure de Kabgayi. Elle fut célébrée par l’Abbe Jean MALIYAMUNGU.

- Du Mercredi 24 avril, au Jeudi 25 avril 2024 : La Visite de l’évêque du diocèse de Byumba, S.E Monseigneur Papias MUSENGAMANA. Dans la matinée de ce jeudi, il a présidé la messe pour la communauté et il a rencontré les séminaristes de son diocèse un par un.

- Dimanche le 28 avril 2024 : Le cinquième dimanche de Pâques. La messe a été célébrée par l’Abbe Melchior MUBANO.

- Mardi le 30 avril 2024 : La présentation d’une pièce théâtrale préparée par les membres du Mouvement pour la non-violence active et évangélique de notre maison. Le théâtre était intitulé :"INJISHI Y’UBUMWE ". Dans le même spectacle, le président du Mouvement pour la non-violence active au niveau national, Mr Charles SERUSHYANA, a décerné les certificats aux dix membres de ce mouvement qui terminaient leur formation.

- Mercredi le 01 mai 2024 : La fête de Saint Joseph le travailleur et journée du travail

- Dimanche le 05 mai 2024 : Sixième dimanche de Pâques. La messe a été célébrée par l’Abbé Pascal NIZEYIMANA. Après la messe, il y a eu des rencontres sportives entre le Grand séminaire de KABGAYI et le Grand séminaire propédeutique de RUTONGO sur les terrains de la propédeutique de Rutongo.

- Du Samedi le 11 au Dimanche le 12 mai 2024 : Week-end de Récollection et Solennité de l’Ascension. La Recollection avait pour thème « Toi, suis-moi » (Jn 21,22). Le prédicateur était l’Abbé Michel MUHOZA, prêtre du diocèse de BYUMBA.

- Mercredi, le 15 mai 2024 : Arrêt des cours pour la classe de la troisième année de philosophie. Le même jour nous avons eu la visite de son Excellence Monseigneur Anaclet MWUMVANEZA, évêque du diocèse de Nyundo. Il a rencontré les séminaristes de son diocèse individuellement.

- Samedi le 18 mai 2024 : Visite de S. E. Monseigneur Jean Marie Vianney TWAGIRAYEZU, évêque du diocèse de Kibungo. Il s’est entretenu avec les séminaristes de son diocèse, un par un.

- Dimanche le 19 mai 2024 : Solennité de Pentecôte. La Messe a eu lieu à la Basilique mineure de Kabgayi. Elle a été célébrée par l’Abbé Claudien MUTUYIMANA et animée par notre communauté.

- Lundi le 20 mai 2024 : Début des examens pour la classe de la troisième année.

- Jeudi le 23 mai 2024 : Visite de S. E. Monseigneur Vincent HAROLIMANA, évêque du diocèse de Ruhengeri. Dans l’avant midi, il a rencontré les séminaristes de son diocèse un à un.

- Vendredi le 24 mai 2024 : Visite de Son Eminence Antoine Cardinal KAMBANDA, archevêque de Kigali. Il est venu pour s’entretenir individuellement avec les séminaristes de l’archidiocèse de Kigali. Le même jour, les séminaristes de la 1ère et la 2ème année de ont représenté notre communauté dans la commémoration par les écoles du génocide contre les Tutsis en 1994 sur la colline de Kabgayi.

- Dimanche le 26 mai 2024 : Solennité de la très Sainte Trinité. La messe a été présidée par l’Abbé François Xavier TWAGIRUMUKIZA.

- Mardi le 28 mai 2024 : Arrêt des cours et début du temps de repasse en première et deuxième année de philosophie.

- Vendredi le 31 mai 2024 : Fin des examens semestriels pour les séminaristes de la troisième année et préparations pour les examens de Baccalauréat.

- Samedi le 01 juin 2024 : Congé du Recteur et messe commémorative du génocide contre les Tutsis ici au Philosophicum.

- Dimanche le 02 juin 2024 : Solennité du très Saint Sacrement. La messe solennelle du Corpus Christi a eu lieu à la Basilique mineure de Kabgayi et fut célébrée par S.E Monseigneur Balthazar NTIVUGURUZWA. Il n’y a pas eu de procession du Saint Sacrement parce que c’était le jour de la commémoration des victimes du génocide contre les Tutsis sur la colline de Kabgayi.

- Lundi le 03 juin 2024 : Début des examens de fin d’année pour les classes de la 1ère et 2ème année.

- Mardi le 04 juin 2024 : Conseil de délibération de la troisième année de philosophie.

- Vendredi le 07 juin 2024 : Solennité du Sacré-Cœur de Jésus. La messe fut célébrée par l’Abbé Jean MALIYAMUNGU.

- Dimanche le 09 juin 2024 : Dixième dimanche du temps ordinaire. La messe a été célébrée par l’Abbé Melchior MUBANO.

- Dimanche le 16 juin 2024 : Onzième dimanche du temps ordinaire. La messe a été célébrée par l’Abbé Pascal NIZEYIMANA.

- Lundi le 17 juin 2024 : Examen écrit de Baccalauréat pour la classe de la 3ème année.

- Vendredi le 21 juin 2024 : Premier conseil académique pour les classes de la 1ère et 2ème année. 0786124095

- Samedi le 22 juin 2024 : Départ en vacances pour les classes de la 1ère et 2ème année.

- Dimanche le 23 juin 2024 : Douzième dimanche du temps ordinaire. La messe fut célébrée par l’Abbé Télesphore NYANDWI TORINGABO.

- Lundi le 24 juin 2024 : Examens de reprise pour les classes de la 1ère et 2ème année.

- Mardi le 25 juin 2024 : Examen oral de Baccalauréat

- Samedi le 29 juin 2024 : Deuxième conseil académique pour les classes de la 1ère et 2ème année, et clôture de l’Année Académique 2023-2024